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dont ils pouvaient faire leur profit, surent conserver intact l’esprit national ; la persécution allemande tenait constamment leur patriotisme en éveil ; mais ils ne permirent point qu’elle le surexcitât jusqu’à un paroxysme dangereux. A la froide résolution de leurs oppresseurs, ils opposèrent plus de résolution, plus de sang-froid, et finalement restèrent les plus forts.

De ces trois provinces, de ces trois peuples longtemps soumis à des dominations et à des influences diverses, il faut aujourd’hui refaire une seule nation, un seul État. Le premier soin du gouvernement central a été d’unifier la loi. Une commission de jurisconsultes a été instituée à cet effet ; elle siège à Varsovie et poursuit activement ses travaux. Le docteur Makarewicz, professeur de droit criminel à l’Université de Lwow, et membre de la commission, a bien voulu me donner quelques indications sur la méthode suivie.

— Notre intention, m’a-t-il dit, n’est pas de faire une compilation, qui manquerait nécessairement d’unité, mais de créer un système nouveau. En Posnanie, on appliquait la loi allemande, telle que l’établit le nouveau Code civil promulgué en 1900. La législation autrichienne, qui était en vigueur en Galicie, offre un mélange de théorie allemande, de tradition catholique et de coutume locale. Dans l’ancien royaume, comme en Russie, on suivait, pour le droit civil, le code Napoléon et, pour le droit criminel, un code pénal très particulier. Provisoirement, nous laissons à chaque province son ancienne législation ; pour les relations de province à province, nous appliquons tant bien que mal les principes du droit international, public ou privé. La Commission est divisée en plusieurs sections, dont chacune a entrepris une partie de la tache ; unification et réforme du droit civil, du droit commercial, du droit criminel, de la procédure. Une année nous suffira, je pense, pour terminer nos travaux. Mais nous avons l’espoir que la Commission ne sera pas dissoute après avoir achevé cette première tâche, et qu’elle sera transformée alors en une sorte de Conseil d’Etat, organe indispensable à une nation dont le corps législatif, élu suivant les règles que vous connaissez, ne peut avoir qu’une compétence juridique assez limitée.

Un effort analogue a été entrepris dans l’administration. Le gouvernement central est représenté en Galicie et en Posnanie par deux délégués généraux. Ces deux provinces conservent