Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 59.djvu/351

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Liévin, Courrières, Dourges), où ils se résument en des amoncellements de matériaux éboulés et de fers tordus. Ailleurs, ils ont été légers et rapidement réparables. Les dommages systématiques s’étendent à toute la zone occupée par l’ennemi et sont énormes. J’aurai à revenir, quand nous nous occuperons des réparations, sur le tableau que présentent ces monceaux de briques écroulées ou réduites en poudre, ces fosses d’où l’eau dégorge à la surface. Les cuvelages crevés immobilisent, dans le Bassin de Lens, une production de 8 millions de tonnes ; à Courières et Dourges, 4 millions ; dans le département du Nord, 8 millions. Au total, 220 fosses ont été rendues inutilisables pour plusieurs années et la moitié de notre production nationale a été annihilée : exactement 21 millions de tonnes sur 41 millions, avec les trois quarts de notre production de coke métallurgique. Auprès du dommage indirect qui en résulte pour notre pays par l’impossibilité de produire, on peut considérer comme presque secondaire le prix du dommage matériel, bien qu’on l’estime au moins à trois milliards. Si un coup de baguette pouvait nous rendre nos mines telles qu’elles étaient avant la guerre, telles que sont restées les mines allemandes, dont aucune n’a eu à souffrir le moindre dommage, telles que sont celles de tous nos concurrents mondiaux qui nous accusent volontiers de mendicité, nous aurions avantage à payer le sorcier qui réaliserait un tel miracle, une somme supérieure à trois milliards !…

Et je n’ai parlé ici que de nos mines. Peut-être n’est-il pas inutile de rappeler que le même plan a été réalisé par nos ennemis pour toute cette industrie du Nord, dont nous n’avions jamais apprécié le rôle prépondérant dans notre vie économique comme depuis le jour où son appui nous fait défaut. Partout, nous voyons qu’on a procédé à peu près de même : d’abord par réquisitions régulières, puis par réquisitions générales, en emmenant au besoin le directeur comme otage. On a volé ainsi tous les stocks de matières premières, tous les métaux, puis toutes les machines-outils, les trains de laminoirs, les machines soufflantes, les groupes électrogènes, les ponts roulants, les transmissions, les courroies, les instruments de précision des laboratoires, etc. Enfin, on s’est attaché à démolir, ou à rendre savamment inutilisables les appareils difficiles ou impossibles à transporter. On a brisé au marteau et réduit en