Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 59.djvu/32

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

raison de la distance qui vous sépare de la 5e armée, votre intervention risquerait d’être inefficace. Il n’y a pas lieu de compter sur l’offensive anglaise. Votre rôle consiste à couvrir Paris. En conséquence, repliez-vous sur la capitale, et mettez-vous dès maintenant en relations avec le Gouverneur militaire. Le flanc de la 5e armée se trouve complètement découvert. Dans ces conditions, le moindre échec courrait le plus grand risque de se transformer en une déroute immédiate au cours de laquelle les restes de nos armées seraient rejetés loin du camp retranché de Paris, et complètement séparés des forces anglaises.

Dans cette même journée du 1er septembre, est rédigée l’Instruction n° 4 qui, reprenant l’Instruction du 25 août, met au point l’ensemble des décisions du général en chef.

Malgré les succès tactiques, obtenus par les 3e, 4e et 5e armées dans la région de la Meuse et à Guise, le mouvement débordant effectué par l’ennemi sur l’aile gauche de la 5e armée, insuffisamment arrêté par les troupes anglaises et la 6e armée, oblige l’ensemble de notre dispositif à pivoter autour de sa droite. Le mouvement de repli peut conduire les armées à se retirer pendant un certain temps dans la direction générale Nord-Sud.

Enfin, dans l’Ordre général n° 1, du 2 septembre du soir, le général Joffre découvre toute sa pensée à ses commandants d’armée. Cet ordre nous apporte l’expression même de la volonté et du caractère de l’homme qui l’a écrit à la veille de la plus grande bataille de tous les temps :

Une partie de nos armées se replie pour resserrer leur dispositif, recompléter leurs effectifs et se préparer avec toutes chances de succès à l’offensive que je donnerai l’ordre de reprendre dans quelques jours. Le salut du pays dépend du succès de cette offensive, qui doit, en concordance avec la poussée de nos alliés russes, rompre les armées allemandes que nous avons déjà sérieusement entamées sur différents points. Chacun doit être prévenu de cette situation et tendre toute son énergie pour la victoire finale. Les précautions les plus minutieuses comme les mesures les plus draconiennes seront crises pour que le mouvement de repli s’effectue avec un ordre complet, afin d’éviter les fatigues inutiles. Les fuyards, s’il s’en trouve, seront pourchassés et passés par les armes. Les commandants d’armée feront donner les ordres aux dépôts pour que, d’urgence, ceux-ci envoient aux corps le nombre très largement calculé des hommes nécessaires pour compenser les pertes faites et celles à prévoir dans les prochaines journées. Il faut que les effectifs