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prévision de nouvelles attaques pendant la nuit. Ces attaques se renouvellent plusieurs fois, en effet, mais elles sont toutes brisées par la résistance des troupes et le feu de notre artillerie. La ville a beaucoup souffert du bombardement, ainsi que les maisons qui bordent la route jusqu’à la gare de Caeskerke et cette gare elle-même. Nos pertes sont sérieuses.

Dans la soirée, on me signale qu’une compagnie allemande occupe le château de Woumen sur lequel je fais ouvrir le feu de nos batteries du Sud.


21 octobre.

Vers 2 heures du matin, je suis avisé que les Allemands attaquent d’une façon continue, à cheval sur la route d’Eessen, et qu’ils se rapprochent peu à peu de nos tranchées. Prévoyant un assaut, le colonel Jacques me demande 2 compagnies de marins de plus, que je lui envoie aussitôt. L’assaut se produit en effet, mais il est enrayé et repoussé, non sans grosses pertes.

Vers 3 heures, je prescris de relever, avant le jour, les compagnies de marins qui ont été engagées la veille, et de les mettre en réserve au carrefour d’Oude-Barreel. La relève est difficile, et le ravitaillement ne l’est pas moins. La consommation de munitions d’infanterie est très forte, et je demande 500 000 cartouches au Gouverneur de Dunkerque, qui me les fera parvenir dans la journée à la gare d’Ootskerke.

A 6 heures, le bombardement par obus de 150 recommence, très violent, sur nos tranchées et sur la ville où les mouvements de troupes deviennent dangereux. Vers 8 heures, un obus éclate sur une section de marins, lui tue 9 hommes et en blesse 25 dont le capitaine de compagnie (lieutenant de vaisseau de Monts). Notre artillerie fait de son mieux pour contrebattre, mais sans succès apparent, faute de portée suffisante, et aussi à cause des difficultés d’observation et de notre pauvreté en matériel téléphonique. Ma brigade n’en a presque pas, et la brigade belge en a peu. Nous trouvons bien des appareils dans les maisons de la ville, mais nous manquons de fils, et ceux que nous élongeons sont vite coupés par les obus, par les bestiaux qui sont encore dans les prairies, ou par des maladroits. Je me trouve réduit à faire ouvrir le feu des batteries par des estafettes moto-cyclistes, mais c’est bien long dans ce terrain fangeux, surtout la nuit. Finalement, je donne aux batteries la consigne