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avec leurs puissantes armées, sont comme les premières colonnes de l’empire… C’est parce qu’on reconnaissait l’importance de la Bavière et les services qu’elle avait rendus dans la guerre nationale, qu’elle a reçu, en adhérant au nouveau statut, des droits réservés qui lui donnent le pas sur tous les autres États confédérés. Seuls des ignorants peuvent parler d’une vassalité bavaroise. »

Un amour-propre aussi exaspéré ne va pas sans qu’on envisage la satisfaction des appétits historiques. Le royaume en effet n’a pas renoncé à s’agrandir. Certains regrettent que son entrée dans l’Empire ait pour conséquence qu’il lui soit désormais interdit d’acquérir des territoires. D’autres au contraire ripostent que tous les espoirs sont encore autorisés, comme au temps de l’ancienne Confédération. Jadis les accroissements étaient licites, avec l’assentiment de l’Empereur et du collège des princes. Rien n’a été changé ; la constitution de 1871 ne contient aucun paragraphe qui les défende ou les empêche. Il n’y a donc qu’à saisir les occasions lorsqu’elles se présenteront, et au besoin à les provoquer. Tels événements peuvent naître qui permettront de réaliser le programme national, soit par compensation, soit par voie de conquête.

Les revendications les plus immédiates de la Bavière se réduisent à deux. La première consisterait à se faire rendre par la Prusse les districts ravis en 1866, districts d’une superficie très réduite, mais dont le retour guérirait une blessure toujours saignante. A côté de cette irredenta, il y en a une seconde, celle-là beaucoup plus considérable, et c’est le Tyrol. La cause de la grande faveur qu’a rencontrée aux temps de Napoléon la politique de Montgelas, c’est que ce ministre a rendu à la Bavière cette province perdue depuis plusieurs siècles. « Montgelas, écrivent Denk et Weiss dans leur histoire du royaume[1], a été l’homme de la situation… Il a fait de l’agrandissement du territoire le but immuable de ses efforts. »

Aucune erreur n’est possible. C’est bien vers le Tyrol que tendent toutes les aspirations de la nation, et des écrivains très récents ne se sont pas fait faute de le redire, avec plus ou moins d’énergie et de clarté. « L’auteur, déclare Riezler en se désignant lui-même[2], se livrerait à sa tâche avec la plus

  1. Denk et Weiss, Unser Bayerland (1906), p. 471.
  2. Riezler, Geschichte Bayerns, t. I, p. 4.