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engendrés peuvent donc être d’une extrême intensité, pourvu que la conductibilité de l’air soit suffisante.

L’air au niveau du sol a une conductibilité très faible, mais non nulle. La preuve, c’est qu’un objet chargé d’électricité et placé sur un support, même parfaitement isolant, perd peu à peu son électricité dans l’air ambiant.

Des recherches récentes ont élucidé le mécanisme de cette conductibilité de l’air, — et d’une manière générale de la conductibilité des gaz, — et établi qu’il est le suivant. Une petite partie des molécules de l’air sont continuellement dissociées, disloquées, si l’on peut dire, par diverses causes et notamment par les rayons du radium qui émanent partout, en très petite quantité, de l’écorce terrestre. Ces rayons constituent à l’égard des particules ultimes de l’air, un bombardement d’une vitesse et d’une intensité prodigieuses qui arrive à disloquer certaines de ces particules. Or les atomes des gaz, sont, je l’ai expliqué ici maintes fois, constitués par des petites planètes infimes, des électrons, chargées d’électricité négative tournant autour d’un petit soleil central chargé d’électricité positive de telle sorte que l’ensemble de l’atome est électriquement neutre.

Si un rayon du radium pénètre efficacement dans un tel atome, il y produit une véritable catastrophe infime, une dislocation analogue à celle que pourrait produire une étoile traversant à toute vitesse le système solaire. Il arrive qu’un des électrons de l’atome soit arraché alors à celui-ci et se mette à circuler librement dans l’air ambiant ; au lieu d’un atome neutre, nous avons donc maintenant deux particules indépendantes : l’une chargée d’électricité négative constituée par l’électron détaché et les molécules qui peuvent s’agglomérer à lui, l’autre constituée par le restant de l’atome, et qui est maintenant chargée d’un excès d’électricité positive. Ces deux particules plus ou moins conglomérées avec les molécules neutres qu’elles peuvent s’attacher dans leur course ont été appelées des « ions, » et on dit qu’un gaz, dont une partie des atomes est ainsi disloquée par un rayonnement tel que celui du radium, est « ionisé » par ce rayonnement.

Supposons maintenant que dans de l’air ainsi ionisé on produise une différence de potentiel, une force électromotrice, par exemple en y plaçant deux lames métalliques séparées par une couche d’air et réunies respectivement aux deux pôles d’une pile, ou aux deux bornes d’une prise de courant d’appartement (dans un secteur à courant continu comme celui de la rive droite à Paris).