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Pardieu pour défendre Lille et le canal. C’était bien peu de monde pour un front de plus de vingt-cinq kilomètres…

La ville de Lille et sa « garnison » paraissaient ainsi considérées comme sacrifiées.

Et à 17 heures 45, pendant que le lieutenant-colonel des Vallières téléphonait pour la première fois à la préfecture de Lille, je partais pour la Halte de Mazingarbe.

A 19 heures, le général Maistre donnait ses nouveaux ordres en conformité de ceux que je venais de lui apporter et me mit au courant de ce qui s’était passé à la 13e division d’infanterie.

L’attaque principale commandée par le général B… préparée depuis l’aube, et dont le déclenchement avait été ordonné à 10 heures par le général Maistre ne s’était produite qu’avec un retard énorme, vers 19 heures… ne pouvant ainsi suffisamment appuyer l’effort fait par la 3e division de cavalerie de Noulette sur Notre-Dame de Lorette et ayant donné à l’ennemi tout le temps de se renforcer à Angres, à Liévin et à Lens… Elle avait finalement à peu près échoué sur toute la ligne ; seuls, vers 17 heures, des éléments de la colonne de droite avaient atteint la Halte de Liévin.

C’était navrant, d’autant plus que l’opinion du général Maistre était qu’il y avait peu de chose à sa gauche vers Carvin (de la cavalerie et de l’artillerie et pas d’infanterie) et que le contour apparent de la région de Lille était heureusement resté le même pour l’ennemi depuis le 5, ce qui avait dû l’obliger à élargir vers le Nord le « mouvement tournant » qu’on lui supposait.

Le général Maistre me cita pour finir l’opinion du général Hély d’Oissel, commandant la division de cavalerie qui opérait vers Armentières, d’après lequel les corps de cavalerie allemands engagés par l’ennemi devant Béthune étaient destinés à nous attirer au Sud de Lille et à « masquer un grand mouvement plus au Nord vers Ypres et l’Yser. »

En rentrant à 23 heures à Saint-Pol, je mis au courant de la situation le général de Maud’huy qui avait déjà donné à 20 heures l’ordre d’opérations pour le lendemain, d’après lequel « les directives de la veille étaient maintenues. »

La situation s’était à peu près stabilisée pendant la journée tout autour d’Arras, malgré de violentes attaques ennemies contre la ville que les Allemands n’avaient pas prise et ne devaient pas