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principe absolu, du moins une réalité défendable. Mais il est clair que, sur ces deux points, le Centre se sépare des démocrates qui ne veulent ni le démembrement de la Prusse, ni l’école confessionnelle. Ce qui ne l’empêche pas d’envisager avec calme la séparation des Églises et de l’État, félicitant les auteurs de la Constitution d’avoir créé un régime assez souple pour que le Centre y trouvât son compte. Même point de vue conciliateur en matière financière, économique ou sociale. « Restons fidèles, dira-t-on, à la tradition de Windthorst. Soyons le « parti moyen » par excellence, pour sauver l’Allemagne de la révolution sociale et de la restauration. Nous serons ainsi le noyau solide du gouvernement. »

Les socialistes majoritaires prétendent, eux aussi, préserver l’Allemagne de ces deux dangers. Ils sont aussi prudents que le Centre, étant, comme lui, sollicités de divers côtés. Si le Centre se trouve entre la droite et la coalition, la social-démocratie est placée entre la gauche socialiste et cette même coalition. Elle est exactement, à cet égard, le pendant du Centre. Sa politique louvoyante est plus difficile à définir que celle des indépendants. Elle répudie toute dictature de classe, veut abolir les différences sociales et préconise le « gouvernement du peuple travailleur par la démocratie. » L’égalité des droits politiques ne suffit pas ; il faut que disparaissent encore les raisons de conflits sociaux. On se ralliera donc aux démocrates et au Centre parce que ces partis renferment des éléments socialistes. En d’autres termes, on prétend donner au terme de « prolétaire » plus d’extension, confier le pouvoir, non seulement aux ouvriers, mais encore aux employés et aux fonctionnaires. Voilà l’idée maîtresse. Mais on se gardera bien d’aller trop vite en besogne. Notre société, dira-t-on, n’est pas mûre pour le socialisme intégral. La majorité prolétarienne, c’est le peuple lui-même, l’ensemble de ceux qui travaillent. Si la violence fut nécessaire pour la conquête de la démocratie, elle ne l’est plus au moment où il s’agit de perfectionner la démocratie et de fonder la justice sociale.

Telle est la coalition gouvernementale. Les trois partis cherchent ainsi à oublier momentanément les divergences qui les séparent. Mettant certains principes en commun, ils se proposent le même but. : préserver l’Allemagne de la révolution et de la restauration, de l’anarchie et de la guerre civile. Le moyen de salut, ils le voient dans une politique composite qui,