Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 58.djvu/697

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LES VILLES D’OR

I
DE LA MER ATLANTIDE AU PATS DES LOTOPHAGE

Brûlées par des soleils séculaires, enfouies sous le sable, l’argile et les décombres, elles y ont pris les colorations ocreuses de la glaise, les tons d’ivoire et d’or mat des ossements et des marbres fraîchement exhumés, les rousseurs chaudes des vieux murs longuement dorés et peints par la lumière méridionale. Cette dorure est plus ou moins intense, plus ou moins éclatante, selon les lieux et les ciels, selon que les ruines sont plus ou moins proches de la mer ou du désert, ou encore qu’elles ont plus ou moins séjourné sous la terre. Mais, de loin comme de près, elles semblent toutes d’or. Elles sont, pour les yeux comme pour l’imagination, les villes d’or. Ce sont les villes mortes de l’Afrique latine, cités, municipes et colonies, dont les vestiges, sur un parcours de près de cinq cents lieues, jalonnent toute la terre africaine, depuis Volubilis la Marocaine jusqu’à Gigthi la Tunisienne, — de la mer Atlantide au pays des Lotophages.

Les villes d’or s’opposent, en un contraste saisissant, aux villes blanches de l’Islam.

La ville d’or, avec ses colonnades, ses temples, ses basiliques, ses arcs de triomphe, son forum où l’on cause et où l’on flâne, sa tribune aux harangues où l’on pérore, son peuple de statues, ses inscriptions dédicatoires ou commémoratives, qui s’adressent non pas seulement à ses citoyens, mais à l’univers, mais à tous les siècles à venir, son amphithéâtre qui convie des