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Que sont les cérémonies auxquelles nous venons d’assister, sinon une nouvelle consécration de ce rôle à la fois humain et providentiel ? La France fut toujours et partout, dans le monde, le champion de l’indépendance et de la liberté. Quand le général Pershing disait : « Lafayette, nous voilà ! » c’était à cette même tradition qu’il s’attachait.

Voilà donc la mission de Jeanne d’Arc et celle de la France qui se prolongent simultanément dans la paix.

Dans la guerre, la principale vertu, c’est le courage ; dans la paix, la principale vertu, c’est la patience. Jeanne d’Arc a attendu cinq siècles. La France sait que le monde ne sera pas libéré en un jour : s’il le faut, elle aussi, attendra.

Après la guerre de Cent ans, il se produisit dans le monde une explosion inouïe. Les règnes de Louis XI et de Charles VIII préludèrent à la Renaissance. L’Europe moderne naquit de cette crise sanglante.

Personne ne peut dire ce que sera le monde de demain. Cependant il faut bien reconnaître, qu’avant d’en venir aux grands apaisements, les grandes guerres sont, d’ordinaire, suivies de grands troubles qui paraissent les prolonger. Tant d’hommes vigoureux et violents, arrachés au train de la vie commune, ne rentrent pas aisément dans l’ordre. Et, il en est des peuples comme des hommes : ils subissent longtemps l’énervement des grandes crises et rentrent difficilement dans le repos.

Les vainqueurs ont charge d’âmes. Ayant combattu au nom du droit et de la justice, c’est à eux qu’il appartient de réintégrer, le plus rapidement possible, leurs propres principes dans les mœurs universelles.

Et c’est aujourd’hui le rôle particulier de la France. Parmi les autres peuples, cet idéal est le sien, puisque son sacrifice fut le plus douloureux. Logiquement, plus elle a souffert pour la bonne cause et plus elle doit s’y dévouer.

Mais comment réussirait-elle seule ?

Voici que revient vers elle ce puissant agent de paix et de justice qu’est l’Eglise. L’Eglise sent ces choses-là avant tout le monde. Comment, de son côté, resterait-elle séparée de la France puisque la France veut le bien ?

Que l’on compare donc les doctrines et les principes des écrivains et des philosophes allemands à ceux de nos professeurs et de nos écrivains. Où est l’insolence matérialiste, le