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lendemain matin au point du jour direction Arras… et, la fenêtre ouverte sur les mêmes étoiles, j’écoutai le grondement du canon qui depuis la veille semblait avoir gagné étrangement vers le Nord.

Au loin vers Bapaume des lueurs d’incendie illuminaient le ciel de France..«


II. — LA BATAILLE DU 2 OCTOBRE

Un beau matin d’automne voilé de brume. Un léger brouillard favorable aux mouvements préparatoires aux attaques, et qui devait rendre impossible toute reconnaissance d’avion.

Dès sept heures je quittai Breteuil en auto, emportant les derniers renseignements sur la situation d’ensemble de la 2e armée. Je longeai par la route d’Amiens et de Mailly-Maillet le front de cette immense bataille qui devait dans mon esprit s’achever le jour même par la victoire éclatante de la subdivision d’armée de Maud’huy.

En passant à la Sucrerie, 2 kilomètres Nord de Mailly-Maillet, je m’arrêtai un instant, entre 9 et 10 heures, au poste de commandement du général Brugère. Celui-ci avait porté la veille sur Arras l’une de ses brigades territoriales, la 168e, pour y organiser « la défense de la ville » face à l’Est et au Sud-Est, et venait de donner l’ordre à son corps de spahis auxiliaires, tout « en agissant pour son propre compte et d’une manière indépendante du corps de cavalerie, » de se maintenir à Hénin-Liétard pour couvrir les débarquements qui étaient en voie d’exécution à Lens, et de continuer à tenir le contact de l’ennemi dans la direction de Douai.

Ce n’est pas sans un peu d’inquiétude que je voyais ainsi opérer « dans nos jambes » entre les troupes du général de Castelnau et celles du général de Maud’huy, et indépendamment de l’un et de l’autre, ce groupe de divisions territoriales qui se trouvaient d’ailleurs attaquées, tout simplement par la Garde prussienne ! c’était là une situation bien délicate et bien difficile, mais le général Bru gère s’en tira de telle façon que les divisions territoriales en surent imposer suffisamment à la Garde de Prusse pour obliger celle-ci à n’avancer que prudemment, pied à pied, de village en village, n’osant se porter à un nouveau point d’appui qu’après avoir organisé le précédent…