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se laisser duper par les termes de liberté, d’égalité et de souveraineté populaire. Nous voulons, dira M. Unold, un État populaire (Volksstaat) vraiment libre, non le parlementarisme brutal. Il nous faut l’Etat « organique, » fondé sur la justice et l’équilibre des forces. Voici revenir l’inévitable comparaison avec l’organisme vivant.


Nous pourrions, nous Allemands, grâce au suffrage universel, construire une véritable représentation populaire sur les divisions naturelles du peuple, sur les groupements professionnels existants. Plusieurs symptômes nous prouvent que l’Allemagne se porte vers cette constitution organique. Les groupes professionnels tendent tous à se mieux organiser, à se faire mieux représenter. De là les fameux Conseils, Conseils de travailleurs, voire Conseils d’intellectuels. N’a-t-il pas été question d’instaurer, à côté du Reichstag, un Conseil d’Empire pour la représentation des groupes professionnels ? Le peuple allemand, pour son propre bien et celui de l’Humanité, offrirait alors au monde la démocratie sociale modèle. Hostile à la conception individuelle et mécanique, c’est-à-dire à la conception française de l’État, il fonderait l’État démocratique, vraiment organique, sain et réaliste.


C’est ce que disaient, à peu près dans les mêmes termes, les politiciens du romantisme, Schlegel, Görres, A. Müller. En vérité, on peut mettre les fameux Conseils à toutes les sauces ! On peut, en leur nom, proposer à l’Allemagne, soit de piquer une tête en plein bolchévisme pour réduire à néant les exigences des vainqueurs, soit de reprendre le vieil idéal romantique.

L’idée d’une mission sociale de l’Allemagne vaincue, nombre de nationaux-libéraux, impérialistes convaincus, l’utilisent non sans habileté. Il s’agit toujours de la conquête morale à entreprendre après l’échec des tentatives matérielles et territoriales. On voudrait unir socialisme et nationalisme. Devant quelle synthèse l’Allemagne reculerait-elle ? « Bien que battus, disait récemment Endres, nous croyons, nous parti national, à notre victoire finale, à la résurrection d’une grande nation allemande comprenant toutes les terres germaniques, à la condition que l’idée nationale finisse par s’unir avec l’idée socialiste et l’idée socialiste avec l’idée nationale. » — « Le peuple allemand, disait aussi Léo Simons en août, a de nouveau reçu le bienfait de la souffrance. Il devra recommencer à obéir à la nécessité. Si, pendant les dix années prochaines, il ne peut pratiquer ni