Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 57.djvu/809

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
807
comment finit la guerre.




C’est la violation de la neutralité belge qui a forcé le gouvernement britannique à déclarer la guerre à l’Allemagne ; mais pour que le peuple anglais entrât complètement dans la lutte, il fallut les raids aériens et le bombardement des villes côtières. Sans doute, tout était fait pour activer les engagements volontaires, tracts, conférences, affiches monumentales, mais le meilleur agent de recrutement resta toujours le Zeppelin. Quand les engagements volontaires eurent produit tout leur effet et que, la nécessité s’imposa de recourir au service militaire obligatoire pour entretenir les effectifs, c’est encore le Zeppelin qui, aidé du sous-marin, permit au gouvernement britannique d’imposer le plus grand des sacrifices à la nation qui a le culte héréditaire de la liberté individuelle.

L’Empire britannique, résolument pacifique et confiant dans sa puissance maritime pour se défendre, avait fermé les yeux sur le danger allemand ; un réseau d’influences adroitement tissé enveloppait toutes les classes dirigeantes, dont seuls quelques rares personnages clairvoyants avaient su se préserver ; il s’étendait jusqu’aux partis les plus avancés, grâce aux socialistes du Kaiser. L’Entente cordiale nouée avec la France paraissait non seulement comme un gage de paix, mais comme une garantie absolue. Prête pour une expédition coloniale toujours possible, l’armée anglaise gardait la forme appropriée à ce besoin. La plupart des régiments étaient à deux bataillons, qui alternaient pour le service outre-mer. L’instruction de détail était bonne, mais aucune manœuvre d’ensemble ne les réunissait. Théoriquement, la « Force expéditionnaire » de quatre divisions pouvait bien porter « l’Union Jack » sur le continent, mais c’était pour une manifestation de solidarité bien peu vraisemblable et dont le lendemain n’était pas prévu. Pas d’artillerie lourde, rien du matériel nécessaire à une armée moderne, aucun État-major organisé au-dessus de la Division. — Comptaient à l’effectif, dans les Îles britanniques, 250&#x202F ;000 mercenaires très bons, puis 270&#x202F ;000 hommes de la force territoriale très sommairement organisés et non instruits.

Partant pour une guerre courte, l’État-major allemand devait braver sans hésitation l’entrée en ligne d’un tel adversaire et franchir sans scrupule la frontière belge, et plusieurs