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LE ROI LOUIS XVII

VIII[1]
ENQUÊTES

Mgr de Savines sortit de Charenton transformé par la captivité. Soit que la leçon l’eût corrigé de courir les routes à la poursuite des Dauphins nomades, soit qu’il fût « trop étroitement surveillé, « tous rapports cessèrent entre lui et Hervagault, dès l’entrée de celui-ci à la maison de force de Bicêtre. Pourtant, l’ex-prélat ne reniait pas sa foi en l’origine royale du prisonnier ; on le voit, en septembre 1803, faisant circuler dans Paris « une relation manuscrite de son heureuse rencontre avec le fils de Louis XVI et du projet qu’il a conçu de marier « le rejeton des Rois avec l’une des petites-filles du maréchal de L… » Cette protestation de dévouement inspira d’ailleurs au policier qui la signale, la conviction que « la raison de l’ancien évêque était aliénée. » Cette dernière tentative restée sans succès, Savines renonça à l’apostolat pour se consacrer entièrement à la pénitence : il se retira dans sa province, à Embrun, où sa vieille mère vivait encore. Mais cette femme, jadis philosophe et « esprit fort, » était elle-même, à quatre-vingt-dix ans, touchée de la grâce. Devenue chrétienne ardente, elle avait disputé l’honneur de loger chez elle le Saint-Père de passage à Embrun et, comme on ne pouvait accéder à ce désir, elle implora la faveur d’envoyer au moins l’un des fauteuils de son mobilier dans la maison où le Pape était

  1. Voyez la Revue des 1er  et 15 décembre 1919, 1er janvier, 1er février, 1er  et 15 mars, 15 mai 1920