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comment finit la guerre.

mis soignés dans les ambulances françaises ; quand les états de pertes des armées parvinrent enfin, on compta deux fois les blessés des troupes indigènes et de la brigade russe, et cette erreur (bien que rectifiée avec pièces à l’appui) fut longtemps maintenue devant les Commissions parlementaires par le ministre de la Guerre qui ne faisait rien pour calmer cette émotion.

Le bruit se répandit que les pertes effroyables étaient dues à l’insuffisance de la préparation d’artillerie, que des bataillons entiers avaient été jetés à l’assaut de fils de fer intacts, que le service de santé n’avait rien prévu pour les évacuations et que de nombreux blessés avaient succombé faute de soins. On cherchait des responsables et on réclamait des sanctions.


C’est donc dans une atmosphère de plus en plus hostile que le général en chef poursuivait ses opérations. Pourtant la prolongation de l’offensive n’avait soulevé d’objection ni le 19 à Compiègne, où le ministre de la guerre était venu se renseigner sur ses intentions, ni le 20 à Paris, où le général Nivelle avait été mandé pour conférer à l’Élysée. La 10e armée Duchesne était entrée en ligne entre la 6e et la 5e sur le plateau de Craonne.

Le général Micheler écrivit le 21 que l’offensive entreprise vers le Nord lui semblait réclamer des moyens d’action supérieurs à ceux dont il disposait, et émit l’avis qu’il conviendrait de se limiter à des attaques locales dont il exposait le détail. Le général Nivelle prescrivit alors de se borner à dégager Reims en enlevant Brimont et en donnant de l’air aux sommets déjà conquis de Moronvillers, et en même temps de compléter l’occupation du Chemin des Dames. La préparation de ces deux attaques commença, mais chacune d’elles donna lieu à des incidents caractéristiques.

L’opération sur le Chemin des Dames vers Craonne motiva, de la part d’un jeune député qui servait comme officier d’état-major de l’un des corps d’armée désignés pour l’attaque, une démarche auprès du Président de la République, pour lui signaler l’inquiétude qu’auraient éprouvée les généraux chargés de cette opération.

L’attaque projetée contre Brimont donna lieu à une inter-