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matériel, il était de fait que les progrès de l’évacuation des régions frontières du Rhin libéraient du matériel. De plus, et c’était mon meilleur appui, les Allemands désiraient autant que nous le départ des prisonniers. Le front commençait à ménager quelques ouvertures pour les trains. Voyant que leur chantage au matériel ne réussissait pas, les Allemands se décidèrent à céder.

Il était temps, et même déjà tard. J’avais en effet de grandes inquiétudes pour mes camps de l’Est. Le soulèvement polonais avait noyé certains d’entre eux. J’apprenais seulement au milieu de décembre que, dès le 17 novembre, un camp de l’extrême Pologne avait été occupé avant qu’on ait pu l’évacuer totalement. Je l’ai dit. Il importait donc de vider au plus tôt les camps de l’Est. C’est à cet objet que furent employés les premiers trains disponibles.

Mais ce n’est qu’après l’organisation des camps de passage sur le Rhin, et lorsque le retour en Allemagne des troupes du front eut libéré une grande partie du matériel, que les transports par voie ferrée prirent toute leur ampleur. Je fixai la date au 29 décembre. Or, c’est le 30 que partait de Hambourg le premier vapeur, un allemand, le Batavia, requis par moi, suivi le lendemain du premier bateau français que les troubles de Hambourg et les difficultés de déchargement dans cette semaine de fête avaient retenu depuis le 24.

Les transports baltiques avaient commencé également, et d’abord avec des bateaux allemands. Ils n’étaient peut-être pas aussi rigoureusement aménagés que ceux que Copenhague méditait de nous envoyer, mais ils avaient l’avantage d’exister. D’ailleurs, le premier transport allemand amena des critiques justifiées. Devant l’impatience, bien naturelle, des prisonniers rassemblés au port, le président de la Commission régulatrice, après autorisation du commandant du navire, fit un chargement trop fort et les hommes pris par une tempête de neige ne furent pas abrités. La Baltique fonctionna donc aussi, modestement il est vrai, car les bateaux ne devaient pas dépasser Copenhague, et la capacité de réception dans ce port ainsi que ses moyens d’écoulement étaient maigres. Disons de suite que l’effectif total évacué par les ports allemands fut de 31 126 Français au lieu de 151 000 qui avait été prévu, et les départs par mer se prolongèrent quatre jours au-delà du dernier départ par voie ferrée. Ce résultat, considérable malgré tout, était dû