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plus difficile et plus complexe que celle de la matière inorganique. Pourtant, mes lecteurs n’en ont peut-être pas perdu le souvenir, j’ai montré récemment ici même combien est complexe et merveilleusement agencée la constitution du moindre fragment de métal. Eh bien ! cette complexité merveilleuse de l’atome n’est rien à côté de celle de la matière vivante, d’abord parce que celle-ci est constituée à la base par des atomes inorganiques, — et que le constitué est forcément plus complexe que le constituant, — mais aussi pour beaucoup d’autres raisons.

Quoi qu’il en soit, la connaissance de notre propre fonctionnement, de notre propre nature, n’a jamais cessé d’être, | onsciemrnent ou non, la préoccupation dominante de tous ceux qui veulent savoir. Si beaucoup de savants ont préféré les problèmes, plus accessibles en dépit des distances, du monde physique extérieur, c’est d’abord certes parce qu’ils sont plus faciles ; c’est aussi peut-être, parce que l’examen de soi-même, l’ « endoscopie, » peut conduire à des conclusions de nature à rabattre notre superbe, et que le mat, si douloureux dans sa brutalité, du célèbre anatomiste Farabeuf garde quelque chose de vrai pour tous les chercheurs d’illusions : « Si les morts étaient aussi répugnants que les vivants, je n’aurais jamais fait d’anatomie. »

Tout récemment l’attention du grand public a été vivement sollicitée par des « informations sensationnelles, » pour employer l’argot du jour qui n’eût, sans doute, guère charmé Voltaire. A en croire certains grands journaux, on venait de trouver l’ « élixir de longue vie, » le moyen de prolonger à volonté sinon la vie, du moins la jeunesse, par la simple greffe ou l’ingestion de certains organes animaux.

Du coup, la plupart des gens en oublièrent presque l’âpreté primordiale des problèmes quotidiens, et pendant quelques jours, la politique et les dures questions d’argent elles-mêmes cédèrent presque le pas, dans les conversations, à la physiologie, qui s’était rarement vue à pareil honneur. Puis on parla d’autre chose, la roue de l’actualité, — roue qui a un peu la forme d’une girouette, — ayant légèrement tourné sur son axe, qui est la versatilité humaine.

Plus récemment, — il y a peu de jours, — la même question est revenue sur l’eau sous une autre forme. C’est un grand journal anglais qui a été l’auteur de cette résurrection. Voici d’ailleurs, sans commentaires, les titres et sous-titres de son article : Merveilleuses propriétés de la glande thyroïde qui renouvelle la vigueur, rend possible la production des sexes à volonté, la régularisation de la croissance, expérimentées avec de remarquables résultat aux laboratoires d’Oxford