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comment finit la guerre.

une part plus grande de hasard ; il fallait donc mettre plus de souplesse dans le mécanisme du barrage roulant et en varier la nature. L’ordre d’attaque du groupement Mangin spécifiait : « Chaque objectif devra être atteint d’emblée et d’un seul élan à l’allure de 100 mètres en quatre minutes. L’infanterie sera précédée à 70 ou 80 mètres par des obus percutants et à 150 mètres par des obus explosifs fusants et percutants.

« Toutefois, quand les circonstances l’exigeront et que ce sera possible, grâce aux observations à vue étendue, les tirs d’artillerie seront conduits à la demande de la marche de l’infanterie ; les généraux commandant les divisions organiseront à cet effet une liaison aussi intime que possible entre l’infanterie et l’artillerie. »

Le grand obstacle dans l’organisation de l’attaque était l’état du terrain, affreusement bouleversé par dix mois de luttes incessantes ; dans l’argile détrempée où l’eau sourd à toutes les altitudes, les trous d’obus, presque jointifs, étaient en cette saison pleins d’eau glacée. Sans un aménagement complet du terrain, toute attaque faisait naufrage dans la boue. Il fallut construire 25 kilomètres de route, dont plusieurs en madriers, 10 kilomètres de voie Decauville et de nombreux réseaux téléphoniques, créer partout des dépôts de vivres et de munitions, des emplacements de batteries camouflés, aménager des sources et des conduites d’eau, etc.. La rigueur de la saison, particulièrement âpre sur les Hauts de Meuse, rendait ces travaux très pénibles. Mais les soldats les sentaient nécessaires : ils furent exécutés en cinq semaines avec une abnégation complète et un entrain merveilleux par les divisions qui se succédèrent sur ce terrain jusqu’à l’entrée en ligne des divisions d’attaque.

Le 15 décembre, vers 10 heures, après une préparation d’artillerie aussi complète que possible, les régiments français sortent des tranchées, attaquant de la Meuse à la Woëvre. À gauche, la 126e division Muteau enlève Vacherauville et la côte du Poivre, où elle s’établit ; la 38e Guyot de Salins, revenue sur le terrain de ses exploits, s’empare de Louvemont ; la 37e Garnier-Duplessis s’avance jusqu’au bois des Caurières où elle lutte pied à pied ; la 133e Passaga prend l’ouvrage d’Hardaumont et le village de Bezonvaux. La progression, ralentie sur certains points, amène l’attaque sur son deuxième objectif le 18. En même temps, dès le 15, des reconnaissances