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rie sort par trois vagues successives, très denses, et pénètre dans la position française. Elle y rencontre des difficultés imprévues ; quelques éléments de tranchées subsistent, avec leurs défenseurs ; des groupes sortent de rares abris épargnés, qui luttent bravement, à peine abrités, en infligeant à l’assaillant groupé des pertes sensibles ; sur un front aussi restreint, ces résistances locales suffisent à retarder beaucoup l’avance allemande, très faible à sa gauche, un peu plus forte à sa droite. Mais le 22, le village de Hautmont est enlevé, qui prend à revers la ligne française jusqu’à la Meuse, ainsi que le bois des Caures, où le colonel Driant et le commandant Renouard sont tués après une défense héroïque. Le 23, la percée continue et sa progression fait tomber d’autres positions sur ses deux flancs.

Pendant les trois journées, deux divisions françaises fortement diminuées par le bombardement ont lutté contre cinq divisions allemandes. Le 24, la bataille continue, les Français renforcés de deux divisions, les Allemands de six régiments. La défense, tout en reculant, contient l’attaque en avant des villages de Samogneux, Beaumont et Ornes. Le recul est lent, mais c’est le recul. Chaque mètre de terrain est chèrement payé, mais l’attaque progresse, et l’arrivée des renforts n’a pas suffi à l’arrêter. Le général de Langle de Cary, commandant le groupe des armées du centre, envisage la nécessité du repli sur la rive gauche de la Meuse, qui doit se faire posément, sous peine de devenir un désastre ; en tout cas, les troupes restées dans la Woëvre vont se trouver très éloignées des ponts et sont menacées d’être coupées : leur repli sur les côtes de Meuse lui paraît s’imposer. Le général de Langle expose ses vues au général en chef qui lui donne toute latitude sur ce dernier point, et le laisse seul juge des nécessités du combat, et il ajoute : « Mais vous devez tenir face au Nord entre la Meuse et la Woëvre par tous les moyens dont vous disposez. » En conséquence, le général de Langle donne l’ordre aux troupes de la Woëvre de se replier sur le pied des Hauts de Meuse, comme il en a la latitude, et continue le combat sur son front Nord, comme il en a l’ordre formel. Le général de Castelnau, qui a obtenu du général Joffre de retourner à Verdun, voit le général de Langle à son quartier général le 25 à 4 heures du matin ; il confirme les ordres du général Joffre, et le général de Langle télégraphie au général Herr : « La défense de la Meuse se fait sur la rive