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Convention de Londres. Aux termes de cet article une convention militaire devait être conclue entre les États-majors généraux français, anglais, italien et russe, fixant l’effectif minimum que la Russie maintiendrait contre l’Autriche, afin que celle-ci ne put pas concentrer toutes ses forces contre l’Italie, dans le cas où la Russie déciderait de porter son principal effort contre l’Allemagne.

Cette convention militaire a en effet été signée. L’état-major russe s’est engagé à laisser en ligne contre les Autrichiens un minimum déterminé de forces. Il en avait alors contre eux beaucoup plus que ce minimum. La différence a donc représenté le surplus que, dans l’hypothèse la plus favorable, il pourrait porter contre les Allemands.

Mais les conventions proposent et la fortune des armes dispose. Or les états-majors venaient à peine de conclure cet accord que la fortune des armes est devenue contraire à la Russie. Et l’intervention italienne n’en est arrivée que plus à propos. Elle a, en effet, coïncidé exactement avec le premier de ces profonds reculs, dont l’alternative, avec des avances, hélas ! moins durables, a caractérisé les opérations sur le front russe. Les Russes se sont alors mis en retraite sur l’ensemble de leur ligne, au Sud notamment, évacuant les Carpathes, la Bucovine, la Galicie. Etant donné leur fléchissement, il leur a été précieux que l’armée italienne fût, précisément à ce moment-là, jetée dans la lutte, appelant de son côté une notable partie des forces autrichiennes Et, comme les échecs d’un allié se répercutaient fatalement sur les fronts des autres, il nous a été utile aussi que la diversion italienne vint alléger la pression ennemie sur le front russe. Car nous étions nous-mêmes engagés alors dans les offensives de Champagne et d’Artois et nous avions un intérêt direct à ce que la résistance russe retint le plus possible de troupes allemandes.

Les mêmes qui affirment que leur pays a « sauvé » la France par sa neutralité, en 1914, proclament également qu’il a « sauvé » la coalition par son intervention à la fin de mai 1915. M. d’Annunzio, qui fut l’un des hérauts de cette intervention, avant d’être celui d’un nationalisme exacerbé, s’est fait l’interprète grandiloquent de ce « sauvetage, » comme des autres, dans ses récentes harangues enflammées. « Nous avons décidé du sort de la grande guerre, non trois fois, mais