Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 56.djvu/626

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
Á L’OMBRE DE SAINTE-ODILE
POÈME

L’ESPOIR


Le grand vent, cette nuit, a balayé le ciel :
Dans un air de cristal, le Hochfeld se dessine.
Ecran bleu qu’on dirait presque immatériel,
Et la plaine paraît rapprochée et voisine.

Un frère franciscain, sous les murs du couvent,
Déchire les sillons, et, depuis l’aube, ahane.
Sans relever le front vers l’or souple et vivant
Des genêts caressés par l’heure diaphane.

Travail et pureté : tout le bonheur est là !
Sur les tilleuls sacrés et les herbes flexibles,
La jeunesse du jour fait briller son éclat :
La vie est embaumée à des lys invisibles.

Tout le bonheur est là, dans ces champs, dans ces bois.
Auprès de ces rochers ornés de vertes franges,
Dans ces prés où l’encens vient s’égarer parfois,
Quand la brise a frôlé la chapelle des Anges.

Les nuages d’en bas ne montent pas ici :
Les matins y sont clairs comme ceux de Judée ;
On n’y peut apporter le crêpe du souci.
Et l’âme y rajeunit, par la grâce inondée.