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la maison] dans un bon petit appartement dans le faubourg du Roule, qu’à Dresde, et, surtout [l’attendre] avec son loup près de soi ! Viens donc essayer notre bonne vie.

Allons, adieu. Il est temps de mettre cette lettre à la poste et de t’envoyer mon cœur et mille caresses. Comment ? louloup, cet homme t’a dit ce que je pense, que tu es mille fois plus ravissante aujourd’hui qu’à Genève (et j’en suis sûr ! ) Eh bien ! je lui en veux plus de t’avoir dit ce que j’ai dans l’âme, que de sa passion insensée. Oui, il était avec la Wyse ; elle a eu, je crois, un enfant de lui.

Soigne-toi, remets-toi, et dis-moi que le 5 février tu seras à Wessenfels, à m’attendre. Tu n’attendras pas longtemps. Mais, j’aime mieux Erfurth. La poste [aux chevaux] est sur une grande place où sont les hôtels, et je puis te trouver facilement [là]. Mille tendresses. Adieu loup. Je ne comptais pas l’écrire aujourd’hui ; j’ai travaillé toute la nuit. A demain. Mais tu n’auras de lettre que dans quatre jours. Mon Dieu ! que je t’aime ! Tu m’as dit vivre en moi, comme moi je vis en toi ; mais je n’ai pas d’Anna pour me partager le cœur. Ce n’est pas un reproche ; c’est pour te dire que je suis tout à toi. Mille bons baisers de Cannstadt.

Tu as bien fait de ne pas aller dans le monde. Reste chez toi ; guéris-toi bien. Le monde est un tonneau garni de canifs, comme celui qui me faisait frémir dans l’Adroite Princesse de Perrault.

Reste chez toi, dorlote-toi. Cette Joséphine t’aurait-elle guérie, si pour lui faire passer délicieusement une soirée, tu t’étais fais mal ?

Sa lettre est un chef-d’œuvre d’égoïsme.

Tu n’as les journaux que jusqu’au 15 janvier. Passé ce terme, qui te fait le[s recevoir à Dresde, jusqu’au] 20, « Viens les prendre… » a dit le Spartiate. Oh ! viens, mon loup ! Mon travail sera [alors] pour moi comme, un amusement.

Mille caresses encore.


H. DE BALZAC.