Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 56.djvu/613

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

arrivée le 30 novembre et celle arrivée le 1er décembre. Comment pouvais-je décommander mes places retenues et payées à Paris, et [celle] retenue à Francfort ? Hélas ! j’avais retenu et payé un délicieux appartement, auprès de Beaujon, pour un mois ! Qu’est-ce que tout cela devant ma douleur ? Je viens de pleurer trois heures, comme un enfant. Je comprends tout. Ce serait une cruauté gratuite que de te parler de moi. Je me tairai. Mon premier mouvement était pour partir ; mais l’épouvantable obligation qui pèse, sur ma tête m’a cloué sur place. Rothschild ne fera p.is le versement pour moi : les act[ions] sont, tombées trop bas pour cela. Il faut que je gagne seize mille cinq cents francs d’aujourd’hui au 15 janvier, et il faut faire face aux dépenses de la maison qui sont égales à cette somme au moins. Donc, si tout me poussait à Dresde, les affaires et les travaux à entreprendre m’ont glacé dans mon chagrin. Il est dit que ma vie sera un long assassinat !

Au sortir de ce terrible travail de la Cousine Bette, il faut avoir fini maintenant les Paysans pour la fin de décembre (huit volumes), et faire tout ce qu’il faudra pour trouver les sommes dont j’ai besoin, car il faut perdre toute espérance sur le Nord ; il ne haussera que lorsque les versements seront terminés. Je ne puis compter que sur ma plume. Mais demander trente-deux mille francs à mon travail en quarante jours, c’est sacrifier ou ma vie ou ma réputation.

D’aujourd’hui, jour bien cruel pour moi, car c’est la mort de bien des espérances, je me replonge dans la fournaise ardente d’où je sortais pour te ramener ici. Tout m’est odieux. Tous mes efforts pour te faire un palais inconnu, tous mes succès, tout devient des épées dirigées sur moi.


Lundi, [7 décembre].

Hier, j’ai attendu pendant toute la journée les gens de l’Époque sans pouvoir rien faire, et j’ai fini par aller chez Mme Valmore, qui a perdu sa fille, et chez ma sœur, où je devais me montrer au moins une fois pendant que le prétendu fait la cour à ma nièce. Le mariage parait devoir se faire à la fin de ce mois-ci. Je suis allé, en sortant de chez ma sœur, chez Mme de Girardin, où j’ai fini par voir le gros Saint-Priest, qui coquète avec l’Académie, et qui ne veut pas, dit-il, y entrer