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affaire se fait cette semaine, j’aurai sauvé la position. Mais je serai engagé. Ton voyage en Ukraine, au mois de mai, me permettra de terminer ces nouvelles obligations. Ma situation en ce moment est souveraine. G[eorge] Sand n’en peut plus ; elle n’est sympathique que par la Mare au Diable, et elle n’en fait pas souvent. Elle et [Eugène] Sue se sont coulés à cause de la prédication politique. A[lexandre] Dumas est humilié avec le Constitutionnel et la Presse, il est en Afrique. Il a cru mettre les journaux dans l’embarras. Soulié est bien tombé. Je reste seul, plus brillant, plus jeune, plus fécond que jamais. Les Parents pauvres ont un succès formidable. Les Paysans vont venir ; puis, après, aux Débats, les Petits Bourgeois. C’est à les étourdir tous. Les épreuves de la Com[édie] Hum[aine] m’absorbaient et me prenaient tout mon temps. On va voir ce que je puis gagner par an et ce que je puis faire ! Je compte donner aux Débats, Une Mère de famille, et à la Presse, le Député d’Arcis, en 1847, et faire jouer, aux Français, l’Éducation du prince. Ce sera une année au bout de laquelle j’aurai cent mille francs à moi, mes dettes payées, ma maison payée, mon mobilier payé !

Chaque année, je veux faire mille francs de rentes à mon moutard et ne jamais quitter les jupes de la maman. Oh ! comme je t’aime ! tu ne sais pas combien tu es aimée. Je te le dirai quand nous nous reverrons, dans quelques jours, je l’espère-.

Allons, adieu ; voici le jour, et il faut écrire vingt feuillets, si c’est possible. Mille gentillesses à nos enfants et au m[inou] chéri. Amasse comme je paie, et nous serons bien riches !


Mardi [17 novembre].

Mon bon loup chéri, j’ai reçu hier ta lettre, où tu me demandes d’aller te chercher à Leipsick. J’y réponds avant tout, en te disant que, le 6 décembre, j’y serai. Je n’y peux pas être auparavant, malgré le désir [que j’aurais] d’y aller à l’instant : primo, parce que je dois calculer dix jours pour finir les Parents pauvres ; secundo, parce que j’ai beaucoup de paiements à faire avant de partir ; tertio, [parce] que l’on n’est jamais payé à jour fixe aux journaux ; quarto, parce que je ne « puis pas partir sans avoir mis un domestique à Beaujon, [sans] y avoir installé les lits de domestiques et fait certaines dispositions, comme ta chambre, et quinto, finir des paiements là pour