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d’autorité et moins de soupçon, ou leur ferait parler par des personnes choisies qu’il enverrait dans les villes où l’exercice public de cette religion est permis. » Peut-être, à la vérité, si l’on tient à « tirer aveu écrit » de ceux qu’on aura séduits, il pourra y avoir plus de peine. Mais qu’on n’ait crainte : « quelque argent » en surplus aura raison des récalcitrants besogneux. Aux autres, la menace ; on leur fera craindre que l’on ne les « recherche » et punisse. Et dans ce système, pas besoin de longueries d’apprêt, de ces théologiques palabres, et de toutes ces correspondances savantes, et négociations subtiles qui, — témoin le Jansénisme, — sont périlleuses, éternisent les choses. La « Réunion, » c’est une affaire de finances, traitable par voie administrative, et susceptible donc d’être exécutée, avec l’uniformité mécanique chère aux gouvernements français, sur tous les points du territoire. « Si la chose réussit en Guyenne, écrit Pellot, on pourra faire la même chose dans les autres provinces, en se servant « partout » des Intendants de justice qui pourront agir de concert chacun dans son département avec le prélat de la province, » s’il est « intelligent et zélé. » Et même, sans lui, je pense, si cet ecclésiastique « zélé » n’est pas intelligent. D’ailleurs, l’essai dans le Sud-Ouest peut aller vite. « On sait » déjà « qu’il y a quelques ministres qui témoignent n’attendre autre chose, sinon qu’on leur parle de la part de Sa Majesté. » « On ne sera pas longtemps dans l’incertitude : » c’est l’affaire de quatre ou cinq mois. De cette méthode expéditive et leste de mener les choses, M. Colbert, homme de réalisation, fut évidemment enchanté.

Et tout cela, — sourde obstruction d’une partie des Calvinistes, trop habile immixtion des Jésuites, zèle des convertisseurs laïques et hâte impatiente des pouvoirs civils, — tout cela fît qu’à Metz, au commencement de janvier 1667, tandis que nos deux penseurs religieux causaient ou correspondaient depuis le printemps précédent, ruminaient silencieusement leurs concessions mutuelles, se réjouissaient en leurs bons cœurs de chrétiens du chemin parcouru, et pesaient au poids du sanctuaire les protocoles théologiques qu’on soumettrait aux docteurs des deux partis, brusquement se produisit sur les protestants de Metz et sur Ferry une pression inattendue…

Un dimanche soir, dans ce cabinet qui avait entendu