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varient de 0 fr. 50 à 1 franc par volume (ce dernier prix fort rare et réservé à quelques écrivains en plein succès), ou de 10 pour 100 à 30 pour 100 (ce dernier taux tout à fait exceptionnel) si le calcul des droits d’auteur se fait, non par exemplaire tiré, mais d’après le total de la valeur marchande de l’édition.

Tous ces frais étant défalqués, avant d’encaisser le surplus de ce que peut rapporter la vente du volume, — et, il s’en faut, hélas ! que tous les exemplaires tirés deviennent des exemplaires vendus, — l’éditeur doit en outre consentir aux libraires-détaillants de Paris et de la province, qui sont de précieux auxiliaires pour la vente, une remise qui n’est pas inférieure à 33 pour 100.

Ajoutons que les éditeurs paient davantage les employés de leurs maisons, sont assujettis comme tout le monde à des impôts plus pesants et, par suite de la cherté des divers produits, voient leurs frais généraux sensiblement accrus.

Autrefois, avec les anciens prix, un éditeur prévoyant et attentif à préparer l’avenir de sa maison, pouvait en quelque sorte équilibrer les uns par les autres les auteurs qu’il éditait, afin de s’attacher une équipe d’écrivains grandissant à l’abri de la gloire et du succès de leurs aînés. Avec une part des profits réalisés sur les maîtres, il pouvait risquer un peu d’argent sur les volumes d’inconnus dont la vente était problématique.

Désormais, tant que subsisteront ces prix de revient, les éditeurs ne pourront plus guère prétendre qu’à équilibrer chaque auteur par lui-même, c’est-à-dire les ouvrages d’un même auteur entre eux. Sur les uns, brefs et par conséquent de fabrication peu coûteuse, d’un sujet attachant pour la foule, et, par conséquent, de vente certaine, ils réalisent des gains. D’autres, d’étendue moyenne et de sujet moins palpitant, payent simplement leurs frais. Enfin, ceux de la troisième catégorie, longs, d’un établissement coûteux et sur un sujet moins attrayant, — et qu’ils doivent publier quand même parce qu’ils complètent la figure littéraire de l’auteur, — ne se suffisent pas à eux-mêmes et absorbent une part des bénéfices des précédents volumes.

Mais maintenant les éditeurs n’auront plus assez de marge pour compenser en outre, par leurs livres à succès, le déficit provenant des ouvrages d’inconnus ou de méconnus.

Nécessairement, ils publieront moins. Les jeunes seront