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XI. — LA CONFÉRENCE DE SAINT-JEAN DE MAURIENNE

A sa participation directe aux opérations dans les Balkans l’Italie n’a mis et ne pouvait mettre aucune condition nouvelle. Prêter son concours à ses alliés, dans la mesure de ses moyens, était pour elle un strict devoir d’alliance. Mais il va de soi qu’elle devait y gagner, non seulement en prestige et en influence en Orient même, mais encore en autorité auprès de ses alliés, pour discuter avec eux ses intérêts dans la Méditerranée orientale. Ce n’est pas s’aventurer que d’attribuer à son gouvernement cette vue pratique, au moment où s’est embarquée pour Salonique la 36e division italienne. Il savait que les Français, les Anglais et les Russes avaient, d’ores et déjà, pris entre eux, par rapport au statut territorial futur de l’Orient méditerranéen, des arrangements particuliers, qui réservaient du reste à l’Italie la faculté de faire valoir ses droits à la compensation prévue par la Convention de Londres. Ces arrangements, il avait demandé à les connaître. La communication qui lui fut faite, après août 1916, a été le point de départ d’une négociation poursuivie à Londres pour déterminer sa compensation. Et cette négociation a abouti à un accord, lors de l’entrevue de Saint-Jean de Maurienne, en avril 1917.

C’est dans cette entrevue, qui réunit M. Lloyd George pour l’Angleterre, M. Ribot et M. Barrère pour la France, M. Boselli, M. Sonnino et le marquis Salvago-Raggi pour l’Italie, que fut définie, avec beaucoup plus d’extension que ne le comportait l’article 9 de la Convention de Londres, la compensation éventuelle de l’Italie dans le cas où il serait procédé au partage de l’Empire ottoman ou à sa division en zones d’influence. La formule adoptée pour fixer cette compensation correspondait exactement aux principes appliqués dans les accords anglo-franco-russes. L’accord de Saint-Jean de Maurienne est resté toutefois subordonné à l’adhésion de la Russie, partie contactante aux accords antérieurs, que l’état de son gouvernement empêchait déjà de consulter et que sa chute dans l’anarchie a ensuite rendue défaillante. Il n’a, par suite, jamais été considéré par le gouvernement anglais dont le chef, M. Lloyd George, en avait pourtant été le principal artisan, comme un accord définitif. Mais eût-il été tenu pour tel à Londres, cet accord n’en