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ment français a toujours soutenue et à laquelle est favorable dans notre pays l’opinion publique, qui sait quelles sont nos traditions en Orient et notre amitié ancienne pour les peuples musulmans. L’Angleterre, qui avait hésité, a l’air d’adopter une solution qui est à l’heure présente, quinze mois après l’armistice, la seule raisonnable. Il est à peine besoin d’ajouter que Constantinople sera soumis à un contrôle international et que les Alliés assureront la liberté des détroits. Pour arriver à ce résultat, le Sultan ne disposera d’aucune armée ni en Europe, ni dans une zone à déterminer en Asie-Mineure le long de la mer. Mais ce n’est là qu’une partie du problème turc. Du moment que les Alliés maintiennent le Sultan à Constantinople, ils devront s’entendre avec lui, et avec les éléments politiques pondérés, qui sont capables de gouverner pour constituer un régime viable, pour sauvegarder leurs intérêts multiples, et pour garantir la sécurité des populations chrétiennes vivant dans l’Empire ottoman. La Turquie est en ce moment gravement troublée par les nationalistes turcs, les hommes du Comité Union et Progrès, et tous les agitateurs dévoués à l’Allemagne, qui ont engagé le peuple dans la funeste politique dont la guerre a été le résultat. Si les Alliés arrivent enfin à rédiger un traité de paix avec la Turquie et à le faire signer, le moment est décisif pour définir une politique et pour la suivre : l’accord de Londres et de Paris est sur ce sujet, comme sur les autres, indispensable.

Il ne paraît pas que sur les autres points les négociations de Londres aient eu encore des conclusions aussi claires. La question de la livraison des coupables par les Allemands a reçu une solution qui est toute provisoire. Les Alliés, en réponse au mémoire qui leur avait été adressé à la fin de janvier par le Cabinet de Berlin, ont fini par répondre qu’ils laisseraient les Allemands juger les coupables eux-mêmes, comme ils le proposaient, et qu’ils prendraient ensuite les résolutions qu’ils estimeraient convenables d’après les résultats obtenus par l’action de la justice allemande. L’article du traité de paix qui est relatif à la punition des coupables prévoit en effet le fonctionnement de la juridiction allemande, et, dans cette hypothèse, les Alliés demeurent maîtres de recourir à leurs tribunaux. Cette manière de résoudre une question mal engagée réserve l’avenir. Les Alliés mettent les Allemands en demeure de faire la preuve que, s’ils sont incapables d’arrêter et de livrer les coupables, ils sont du moins capables de les faire juger par la Cour de Leipzig : ils apprécieront les résultats. Si les coupables sont simplement sous-