Page:Revue des Deux Mondes - 1920 - tome 56.djvu/206

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

s’ajouter les bénéfices de la réquisition et des assurances. Jusqu’ici, on ne nous a donné, en regard de ce chiffre, que 850 millions de dépenses plus ou moins justifiées. Qu’on produise donc sans tarder le bilan de cette entreprise.

Au lieu de s’improviser armateur, l’État ferait mieux d’appliquer ses soins à éduquer le personnel de la marine marchande. Nous craignons bien qu’à ce point de vue il n’ait pas fait tout ce qu’il devait. Rien n’est plus important, à l’heure actuelle, que de fournir à ceux qui sont appelés à diriger des hommes des indications morales et techniques appropriées à la mission qu’ils doivent remplir. Or, jusqu’ici, l’Etat s’est borné à donner aux capitaines une éducation surannée dans des écoles d’hydrographie sises dans les ports les plus éloignés du mouvement commercial, tels que Saint-Tropez. Mais il ne s’est jamais soucié de procurer aux capitaines les connaissances pratiques indispensables à leur métier en les mettant en présence des réalités de la mer. Il n’a pas perfectionné leur éducation morale ; en d’autres termes, il ne leur a pas appris à commander. Il faut que ce soit une Compagnie privée qui, se substituant à l’État, dans son propre intérêt comme dans celui de notre marine marchande, se préoccupe de former des hommes appelés à représenter notre pavillon commercial à l’étranger et d’en faire des marins dignes de cet honneur. Jusqu’ici, au sortir des écoles d’hydrographie, les élèves étaient obligés d’aller chercher, au hasard des embarquements, les leçons de l’expérience si précieuses à recevoir dans une profession soumise à tant de caprices météorologiques. La création d’une école sur un cargo mixte leur permettra dorénavant de s’initier à la vie de marin à bord d’une unité tout spécialement aménagée pour cette mission : le Jacques Cartier.

La marine marchande, sans construire ni armer de navires, a donc un rôle très important à remplir pour élever notre flotte de commerce à la hauteur des besoins de la France victorieuse. : Quant au ministre des Travaux publics, que de devoirs s’imposent à lui ! Il lui faut refaire nos routes, reconstituer notre matériel de chemins de fer, amodier nos fleuves, aménager nos canaux, utiliser les forces hydrauliques de la France, reconstituer les villes dévastées… Choses que, seule, la puissance publique peut entreprendre. Nous ne saurions trop applaudir aux devis concernant les travaux dont nous venons de parler,