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d’ouverture de crédits de 1 830 millions déposée par M. Bouis-son ait été votée par la Chambre des députés avant sa séparation. Il est vrai que ce projet de loi a subi de telles modifications que la portée s’en trouve singulièrement amoindrie. Il n’en est pas moins regrettable que la Chambre ait cru nécessaire de donner in extremis cette marque de complaisance aux plus dangereuses idées des socialistes. Aussi bien, la façon dont les débats furent conduits n’a pas contribué à relever le prestige d’une Chambre agonisante, celle que les électeurs viennent de condamner. En effet, un texte aussi important que celui de la reconstitution de la flotte marchande française, qui peut avoir pour résultat d’engager nos finances publiques pour des sommes importantes, a été voté sans discussion dans la journée du dimanche qui a précédé le départ des Chambres, devant des banquettes à moitié vides, au milieu du brouhaha qu’entraînait le vote de trente projets de loi, dont aucun député, hypnotisé par sa prochaine comparution devant le suffrage universel, n’a pas pris même la peine d’écouter la lecture. Et, à ce propos, c’est avec surprise que nous avons noté cette phrase de l’ancien commissaire aux transports maritimes déclarant : « Il avait été entendu à la Commission de la marine marchande que, pour faire voter ce crédit, on éviterait, autant que possible, un débat. » Singulière façon de comprendre la publicité du régime parlementaire ! Nous avons l’espoir que la nouvelle Chambre, tout en restant fidèle à la méthode de travail des grandes commissions, ne permettra pas que le pays soit tenu dans l’ignorance des plus graves décisions législatives que puissent prendre ses représentants.

Pour en revenir au projet en question, celui-ci a été, sur le rapport de l’amiral Bienaimé, l’objet d’amputations considérables. Tout d’abord, le chiffre d’engagements de crédits a été ramené de 1830 millions à 1 080 millions, des doubles emplois ayant été relevés dans les calculs du Commissariat aux, transports maritimes. Celui-ci, non content de monopoliser nos chantiers navals, avait en outre la prétention de se faire ouvrir des crédits supérieurs aux besoins qu’il se proposait de satisfaire. La rédaction de la Commission prévoit en outre une série de restrictions ; exemple : les dépenses relatives à l’acquisition de navires à l’étranger ne seront engagées qu’au cas où les armateurs ne prendraient pas livraison des navires qu’ils