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LA MARINE MARCHANDE
ET L’ÉTAT

Des lettres et des protestations émanant de la Ligue maritime française, de l’Association des grands ports et du Comité des Armateurs de France, ont saisi l’opinion du danger que présente pour la marine marchande l’ « étatisme » introduit dans nos lois à la faveur de la guerre. D’autre part, des débats passionnés viennent de s’ouvrir au Parlement sur cette même question. Nous voudrions à notre tour faire toucher du doigt au lecteur un péril imminent et dont les conséquences, à tant de points de vue, risquent d’être désastreuses.


I. — LE ROLE DE L’ÉTAT

Que l’État ait le droit d’intervenir dans les actes des particuliers lorsque ces actes intéressent la collectivité, nul ne le conteste. Cette intervention peut se manifester sous forme d’action directe ou sous forme de contrôle. Dans l’action directe, l’État prend en main la responsabilité de la gestion. Quand il contrôle, au contraire, il se borne à tracer la voie aux citoyens dans des lois ou des règlements s’inspirant des circonstances, et qui doivent être respectés sous peine de sanctions. Encore une fois, il ne viendrait à personne l’idée de dénier à la puissance publique son droit de contrôle. Loin de combattre son intervention ainsi entendue, il faut au contraire s’en déclarer partisan ; en revanche, c’est un fait que l’action directe de l’État engendre le gaspillage et l’irresponsabilité. L’exemple de ce qui se passe dans la Marine marchande nous en fournit une preuve éclatante.