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presque reconnaître la physionomie, quelquefois sévère, d’un moine robuste et studieux.

Il nous a donné, ce Bénédictin sans le savoir, outre ses fameuses et nombreuses flâneries, un livre sur Beaumarchais ; un, plus considérable, sur Port-Royal ; deux monographies (dans la Collection des Villes d’Art), l’une de Nancy et l’autre d’Avignon ; enfin un volume tout récent : L’opinion allemande pendant la guerre. Et nous en passons peut-être. Que si maintenant on recherche l’unité de ces multiples « essais, » on la trouvera sans peine dans un seul mot, un seul nom : celui de notre patrie. Opus francigenum, dirions-nous volontiers. Ou plutôt, en français, le penseur et l’écrivain lui-même pourrait reprendre, à son compte et pour son honneur, l’invocation du vieux poète, qu’il cite quelque part :


France, mère des arts, des armes et des lois,
Tu m’as nourri longtemps du lait de ta mamelle.


Avec la Grèce et Rome, M. André Hallays n’a guère eu d’autre nourrice. En lui, rien, ou si peu que rien, d’étranger, encore moins d’exotique. Parmi les études de M. Hallays, une pourtant, une seule, et déjà ancienne, traite de l’influence des littératures étrangères. L’auteur ne se déclare pas, avec la même vivacité que Jules Lemaître, dans un article demeuré fameux, l’ennemi de cette influence. Mais après l’avoir constatée au cours de toute notre histoire, s’il ne s’en alarme guère, il est encore plus loin d’en triompher. Surtout il prend soin de distinguer une sympathie, voire une admiration, qu’à mainte reprise il confesse et professe le premier, d’une soumission contre laquelle tout de lui, tout en lui protesterait. C’est vers nous, vers ceux qui sont nôtres, et le plus nôtres, que le porte son inclination naturelle ; c’est parmi ceux-là que l’instinct, le sentiment et la raison l’ont fixé d’abord et pour jamais. On peut dire de lui qu’en aucun temps aucun Français n’a plus aimé la France.


Il a tout aimé d’elle, les choses et les êtres, l’extérieur et le fond, le visage et l’âme. Paris d’abord, sa petite patrie dans la grande, n’a pas une part médiocre de sa tendresse. Enfant de Paris, à son esprit, à son langage et parfois à son accent