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grand Empire britannique, elle n’a pas cessé, un seul jour, « de témoigner de la puissance durable et de la séduction permanente du génie français. » La conduite des Mauriciens en général, au cours des quatre années de guerre mondiale, a été au-dessus de tout éloge.

À l’Ile de France, tout est resté français : langage, écriture, mœurs et coutumes, pensée intime. Notre cerveau étant demeuré celui de nos pères, tout « se francise, » pour ainsi dire, automatiquement à l’île Maurice. L’amour de la patrie d’origine, le profond sentiment de l’honneur français et les instincts de courtoisie et de désintéressement, propres à la race, n’ont jamais fléchi, en dépit du loyalisme toujours officiellement observé vis-à-vis du « conqueror ». La suprême aspiration du Mauricien, c’est la France, dont il se souvient d’avoir glorieusement soutenu la puissance, en son boulevard, sur la mer lointaine.

Les Mauriciens actuels sont, pour la plupart, les descendants d’anciens colons spécialement choisis en France dans l’élite de toutes les classes sociales, en vue de la colonisation des Mascareignes. À ce premier noyau sont venus s’ajouter, par la suite, des cadets de famille, notamment normands et bretons, et des officiers de terre et de mer restés dans l’île au moment de la Révolution.

Véritable réservoir de terre arable, grâce à l’humus de ses anciennes forêts et aux cendres de ses anciens volcans, l’île Maurice offre les plaines de culture les plus fertiles, tandis que ses ports naturels et sa configuration géologique elle-même concourent à sa valeur économique et commerciale. L’ile est, actuellement, pour les trois quarts, plantée de canne à sucre : la canne y a même tué toutes les autres cultures. Elle produit un sucre abondant (le neuvième de la production totale du globe) et de qualité hors ligne (les rapports des expositions en font foi). Tous les capitaux de Maurice, toute la main-d’œuvre indienne sont réunis pour le triomphe de l’industrie sucrière. C’est en grande partie à la race intelligente et travailleuse de l’Inde qu’est due la prospérité actuelle de nos cultures : on a été obligé, depuis plus de soixante ans, de faire appela l’ouvrier agricole des Indes, afin de suppléer au manque de bras des noirs émancipés. Actuellement, l’Indien forme les trois quarts de notre population totale : 300 000 sur 400 000