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LE
VOTE DE LA LORRAINE LIBÉRÉE

Le 16 novembre, pour la première fois, après une année complète de rattachement à l’ancienne patrie, les Lorrains pouvaient exprimer par un vote les sentiments que cette expérience prolongée avait éveillés en eux. Jusqu’alors, le moyen ne leur avait pas été donné de manifester leur satisfaction ou leurs regrets avec des garanties pareilles de sincérité. Il est toujours facile de contester la valeur des démonstrations qui se produisent sur le passage des personnages officiels, des paroles prononcées par les membres d’assemblées, commissions municipales ou conseil supérieur, qu’a composées seul le choix du gouvernement. La presse allemande n’avait pas manqué d’user des arguments qui s’offraient à elle : elle en appelait, contre les manœuvres d’une bourgeoisie dès longtemps francisée, au témoignage des masses ; elle priait l’opinion neutre d’attendre, pour se prononcer, le résultat des élections. Les élections sont faites. Elles ont eu lieu dans des conditions d’absolue régularité : la liberté de réunion, que les lois encore en vigueur auraient permis de limiter, n’a pas subi d’atteinte ; les polémiques, même les plus violentes, se sont développées sans entrave ; l’autorité préfectorale a gardé la réserve entière que les circonstances commandaient. Le résultat est décisif. A Metz, comme à Strasbourg, comme à Colmar, la première consultation populaire depuis l’armistice est une manifestation saisissante de patriotisme français.

A vrai dire, on aurait eu, cet été, quelque motif de craindre, non pas assurément que l’esprit public s’orientât dans un tout autre sens, mais qu’il mit plus de tiédeur dans l’affirmation de