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Volosca y était, et toute l’Istrie jusqu’au Quarnero, et plusieurs des des îles istriennes, grandes et petites. La note I, à l’article IV, précisait : « Depuis le Schneeberg (Monte Nevoso), la frontière descendra vers la côte, comprenant Castua, Matulje (Mattuglie) et Volosca. » Mais, du moment que, soi même, on déclarait le pacte sujet à revision pour y ajouter, du coup on le déclarait sujet à revision pour en retrancher. Si l’on voulait y introduire Fiume, qui n’y était pas, on s’exposait à ce qu’un autre en retirât Volosca, qui y était. C’est la morale ou la dialectique de M. Sonnino qui était la bonne, et personne ne lui aurait fait grief de l’avoir empruntée de la Société de Jésus : Sit ut est, aut non sit ! Rouvrir la question pour Fiume était tout remettre en question, et la partie méridionale ou orientale de ristrie, et les îles du Quarnero, sans parler de la Dalmatie, que l’Italie recevait en vertu de l’article V. Combien, au contraire, les Alliés, la France et la Grande-Bretagne, auraient été embarrassés, si, la convention à la main, l’Italie les eût tranquillement sommées de lui faire délivrer, malgré toute opposition, rien que ce qui lui avait été promis, mais tout ce qui lui avait été promis !

Nous ne savons pas très exactement à quoi, après huit mois de tâtonnements, de tergiversations, de discussions et presque de disputes, d’offres et de refus, de ruptures et de reprises, le Conseil suprême avait abouti. Mais, d’intentions plus ou moins gratuitement prêtées à Gabriele d’Annunzio, on peut induire que l’Italie, dans le dernier état de la négociation, n’avait obtenu ni Volosca, ni Abbazia, ni Albona ; c’est-à-dire qu’elle n’avait plus toute l’Istrie, et que vraisemblablement sa frontière avait été fixée à l’Arsa. Pour Fiume même, tout le monde en connaît la disposition. À l’Ouest, la ville proprement dite, peuplée en majorité d’Italiens : à l’Est, un faubourg, Susak, habité par des Slaves : entre les deux, une petite rivière, que les Italiens appellent la Fiumana, et les Slaves, la Reoica ; au Sud de la ville, le port, divisé en deux parties. À force de chercher, on en était arrivé, dans les commissions de la Conférence, autour du Conseil suprême, à attribuer la ville proprement dite aux Italiens, le faubourg aux Yougo-Slaves, et à internationaliser le port sous le contrôle de la Société des nations.

D’autres solutions avaient été proposées ; d’autres auraient pu être préférables ; d’autres, peut-être, eussent dû être préférées. Par exemple, pour éviter un contact immédiat et une friction constante entre des éléments hostiles, comme pour satisfaire un désir légitime, on aurait pu donner quelque part, à proximité, au jeune royaume des