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pour le trafic maritime, de 477 016 890 couronnes ; pour le trafic par chemins de fer, de 492 827 954 couronnes ; et, en 1913, il était en progrès. Le raisonnement des Italiens, en face d’une telle situation, est celui-ci. Si Fiume n’appartient pas à la même Puissance que Trieste, Trieste est en grand péril. Il est vrai que ce raisonnement se retourne, et que leurs adversaires ne manquent point de le retourner contre eux. Au surplus, ce que M. Icilio Bachich semblait redouter par-dessus tout, quand il a écrit son mémoire, c’était que Fiume, remplaçant Trieste, ne devint l’instrument de la politique d’expansion allemande dans l’Adriatique et le Levant. On ne prévoyait encore ni la défaite de l’Allemagne, ni la dissociation de l’Autriche-Hongrie, ni la formation du royaume des Serbes, Croates et Slovènes, ni la naissance ou la renaissance des États slaves. Mais qu’il s’agisse d’expansion slave ou d’expansion allemande, le problème est le même pour l’Italie, et sa position est la même.

Aux raisons commerciales s’ajoutent les raisons stratégiques. Il serait vain, déclarent les experts, de tenter de pourvoir à une sérieuse et efficace défense de l’Istrie orientale jusqu’à Pomer sans la pleine et absolue maîtrise de Fiume et de tout le Quarnero, y compris les îles. N’avoir pas Fiume ôte toute valeur stratégique à Pola, comme ne pas l’avoir ôte toute valeur commerciale à Trieste. « Des hauteurs de Fiume, on domine et on menace tout le versant oriental du Caldiero ; de celles de la pointe septentrionale de Cherso, toute la côte de l’Istrie orientale jusqu’à l’Arsa ; du détroit de Farasina, où le golfe se resserre et où un bras de mer étroit sépare l’île du port de Fianona, il serait facile d’envahir l’Istrie elle-même jusqu’à prendre Pola à revers et d’empêcher la navigation dans le canal. Des Lussini, enfin, avec peu de batteries et un champ de mines, on fermerait hermétiquement l’entrée du golfe et l’on interdirait même le transit en mer ouverte. » Aussi, conclut M. Bachich, appuyé en général par M, Armand Hodnig, M. Tomaso Sillani, M. Attilio Tamaro, par un homme politique qui signe Italicus Senator, et par l’auteur anonyme d’un ouvrage intitulé : l’Adriatico, « aussi les îles du Quarnero forment-elles une unité indivisible. Les séparer équivaudrait à détruire un corps homogène : ce serait semer des germes de conflit pour demain. De plus, l’Italie réclame spécialement la possession de l’île de Veglia, parce que le centre le plus important de cette île, la citadelle de Veglia est purement et héroïquement italien. »

Comment la convention de Londres du 26 avril 1915, passée