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Bossuet donnera, avec des circonspections scrupuleuses, ce sont elles qu’il donne déjà ici. Déjà, catéchisant Allix Clerginet, il enseigne que le Souverain Pontife est doté d’ « une prérogative d’honneur et de charité, » et comment le Saint-Siège est investi, pour « la proclamation de la foi, » pour la préservation de sa pureté, de l’autorité de la discipline. Et ce que Bossuet proclamera, au temps où il fera de l’histoire, des éclipses fréquentes de la discipline, — à savoir qu’il ne se faut pas scandaliser des lézardes du bâtiment et des réfections nécessaires, — ici déjà, sans hésiter, il le déclare. De même encore, en 1659, à cette humble religieuse, il inculque ce qu’il remontrera, si fréquemment plus tard, et aux ultramontains, et aux religieux et religieuses qui appuient sur eux leur insubordination : à savoir que les Evêques, tous les Évêques, sont les chefs à qui doit se fier et obéir le peuple fidèle ; que » l’ordre épiscopal enferme en soi, avec plénitude, l’esprit de fécondité de l’Eglise ; » « que l’Episcopat est un, comme toute l’Eglise est une ; — si bien que les évêques n’ont ensemble qu’un même troupeau, où chacun conduit une partie du tout, » de sorte qu’en vérité, « ils sont un tout, » et que « Dieu ne les a partagés que pour la facilité de l’application ; » — de sorte, enfin, que le successeur de Pierre n’est que le pasteur central, si l’on peut dire, « donné par Dieu pour consommer ce tout » et pour « lier en unité » cette dissémination forcée.

Ainsi quelques-unes des idées les plus importantes du Bossuet de l’âge mûr, du « Père » futur de l’Église française, apparaissaient déjà, en 1659, écloses et presque complètement organisées, dans cette quatrième lettre à la directrice de la Propagation de la Foi messine, — comme se révèle, dans les trois premières de ces lettres, son cœur de piété.


VI. — BOSSUET ET LE PAYS LORRAIN

Ces documents nous amènent à l’époque où Bossuet va quitter Metz, sans que rien parmi eux nous renseigne sur sa vie matérielle depuis 1653. Cependant cette vie se continuait active, et point sédentaire. Ses fréquents voyages, il n’y a guère pour nous les apprendre que l’histoire de sa prédication depuis qu’elle a été si soigneusement fouillée[1]. Il en fit plusieurs à Paris,

  1. Abbé Lebarq Histoire de la prédication de Bossuet.