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aucune modification ou réserve, et se voient forcées d’exiger des représentants de l’Allemagne une déclaration sans équivoque de leur volonté de signer et d’accepter dans son intégralité, ou de refuser de signer et d’accepter ce traité sous sa forme définitive ; » que, d’ailleurs, « après la signature, les Puissances tiendront l’Allemagne pour responsable de l’exécution du traité dans toutes ses stipulations, » le nouveau « président du ministère d’Empire, » M. Bauer, tâchait de gagner quarante-huit heures. En présentant, le 22 juin, à l’Assemblée nationale son Cabinet fait à la diable, il avait dit : « Il faut signer. Car le refus de la signature ne signifierait nullement une modification du traité : ce ne serait qu’un court ajournement, attendu que notre force de résistance est brisée. Il n’y a aucun moyen d’obtenir mieux. » Mais il croyait apercevoir une lueur : « Le traité, il est vrai, nous donne une emprise qui ne peut nous être arrachée ; c’est la promesse volontaire de l’Entente qu’une révision peut intervenir en tout temps, en vue d’une meilleure accommodation aux circonstances nouvelles qui pourraient surgir. Cette promesse est contenue dans le mémorandum de l’Entente du 16 juin. » Aussi, sans beaucoup de subtilité, s’ingéniait-il à élargir le soupirail par lequel cette petite lueur lui paraissait filtrer. Il s’enhardissait jusqu’à formuler par écrit cette proposition : « Dans le délai de deux ans, compté du jour de la signature du traité, les gouvernements alliés et associés soumettront le présent traité, à fin d’examen, au Conseil des Puissances, tel qu’il est institué par la Société des Nations d’après l’article 4. Devant ce Conseil, les plénipotentiaires allemands jouiront des mêmes droits et privilèges que les représentants des autres Puissances contractantes du présent traité. Ce Conseil prendra une décision sur celles des conditions du présent traité qui portent atteinte aux droits de libre disposition du peuple allemand aussi bien que sur la clause par laquelle le libre développement économique de l’Allemagne dans des conditions d’égalité se trouve entravé. » Autant dire que la paix de Versailles ne serait qu’une trêve de deux ans ; qu’au bout de deux ans, l’Allemagne pourrait revendiquer de nouveau le Slesvig, la Posnanie, la Silésie, ce qu’elle perd de la Prusse orientale et de la Prusse occidentale, l’Alsace-Lorraine elle-même, sans compter l’Autriche dite allemande, en vertu de ses « droits de libre disposition ; » et qu’elle pourrait, d’autre part, en vertu de son « libre développement économique, » réclamer la restitution de ses colonies, une transaction sur les réparations, et la remise de ses dettes. Mais par quoi lui serait-il