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renommée, de crédit et d’autorité que procure le prestige des belles- lettres et des beaux-arts. Auteur des Instructions militaires paternellement adressées au comte de Gisors, le maréchal duc de Belle-Isle, ministre et secrétaire d’État et des commandements de Sa Majesté, lieutenant-général des duchés de Lorraine et de Bar, chevalier des ordres du Roi et de la Toison d’Or, ne souffrirait pas que, dans l’énumération de ses emplois, charges et dignités, on oubliât son titre de protecteur de l’Académie de Metz.

C’est en effet au temps où le duc de Belle-Isle, pair et maréchal de France, était gouverneur et commandant en chef dans les Trois Évêchés, ayant sous ses ordres les lieutenants-généraux du pays messin, du Verdunois, du Sedanois, du pays toulois et du pays de la Sarre, c’est exactement le lundi, 28 mai 1759, que cette compagnie prit naissance, dans une assemblée tenue « en la grand’salle de la maison de MM. les chanoines réguliers du collège royal de Saint-Louis, » messire Nicolas-François Lançon, chevalier, seigneur de Sainte-Catherine, étant maître-échevin de la ville de Metz. Le procès-verbal de cette mémorable séance, rédigé par M. Dupré de Geneste, écuyer, receveur des domaines du Roi, secrétaire perpétuel de la compagnie naissante, nous apprend que, ce jour-là, cette a société d’étude des sciences et des arts, » fondée sous les auspices du maréchal gouverneur, fut pourvue d’une donation par son généreux protecteur, et « décorée du titre d’Académie royale. » Il ne restait plus, pour confirmer cet établissement, qu’à remplir les dernières formalités, à Paris et à Versailles.

Donc, le mercredi 25 juin 1760, par une belle matinée tout égayée de rayons et d’ombres, deux notaires du Châtelet de Paris, maître Frédéric-Henry Mareschal, et son collègue, maître Claude-François Trutat, suivis d’une escorte de clercs et de garde-notes, quittaient la rue de Condé, où leurs panonceaux respectifs brillaient sous les feux du soleil d’un été splendide. Ils étaient mandés, l’un et l’autre, en l’hôtel du maréchal duc de Belle-Isle, rue de Bourbon, faubourg Saint-Germain, paroisse Saint-Sulpice. Là, un magnifique suisse les fit entrer dans une salle où une nombreuse compagnie les attendait. C’étaient les délégués de la ville de Metz, arrivés de la veille, par le coche des messageries royales. On échangea des saints fort obligeants. La délégation des Messins était conduite par M. Jean-Pierre Roucour, avocat au Parlement de Metz et syndic de ladite ville, lequel présenta ses compagnons de voyage, en disant leurs noms, — des noms qui figurent encore sur les registres de l’état civil de l’antique