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l’amiral à l’enseigne Bonnet, celui-ci fut décoré de la Légion d’honneur, le second-maître Thomas et le quartier-maître Luneau de la médaille militaire. La prise du fortin de Boterdyck était en effet d’importance. Elle enlevait aux ennemis le meilleur point d’appui de leur ligne vers Lombaertzyde et sa possession nous rendra les plus précieux services lors de l’attaque du 9 mai. Aussi l’ennemi ne négligea-t-il rien pour le reprendre et, à peine le fortin équipé par les pionniers du maître Jussiaume, nous eûmes à le défendre contre trois assauts forcenés. Dans la nuit du 14 au 15, l’ennemi réussit même, par une attaque à la grenade, « dont une tomba sur la tête du marin Guichaoua et le tua net, » à pénétrer dans ses éléments avancés ; mais le lieutenant de vaisseau Lartigue, qui avait « replié ses hommes à 10 mètres en arrière, » fit ouvrir sur les assaillants un feu de salve qui en tua quatre et tint les autres en respect jusqu’au moment où le second-maître Rosmorduc, qui s’était « offert pour conduire la contre-attaque, » où il déploya « une vigueur et un brio dignes des plus grands éloges[1], » reprit à la baïonnette l’élément perdu. Ne pouvant emporter de vive force la position, l’ennemi tenta de la réduire par le canon. Continuellement le fortin, que l’amiral était venu visiter en plein jour, pour se rendre compte des travaux qu’on y pouvait exécuter et dont la difficulté était extrême (on dut se contenter finalement de le relier par un boyau avec la ligne principale de résistance), était pris sous un feu violent d’artillerie, qui ne laissait pas de nous causer des pertes assez lourdes. Les Allemands, écrira le fusilier Oury, le 29 mars, « ont tellement à cœur que nous leur ayons pris le fortin que, depuis, ils nous envoient des projectiles de toutes sortes : obus de 57, 77, 105 et 120, bombes, torpilles, etc. Ah ! les s… ! Dans ma compagnie, l’effectif est réduit à 125 hommes. »

iii. — préparatifs d’offensive

« Ainsi, écrivait le capitaine M…, les semaines, les mois passaient sans événements bien sensationnels. Le Boche malheureusement nous tuait du monde avec une régularité maudite : il se vengeait de certaines affaires qui avaient coûté à son

  1. Motif de sa citation.