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retrouvons la jeune fille à la Cour de Louis XVIII. Elle est élevée par son oncle et sa tante de Sérignan, deux ganaches. Ses incartades indignent et désespèrent ces deux vénérables momies, tandis qu’elles ravissent le vieux roi, sceptique et homme d’esprit. Elle va jouer, dans les affaires politiques et parmi les intrigues de cour, un rôle sur lequel jusqu’ici nous n’avions pas été suffisamment renseignés par les historiens de la Restauration. Déjà les ultras conspirent, aidés dans leurs mauvais desseins par Mme du Cayla. Cette dame artificieuse et perfide a promis d’obtenir de la complaisance de son royal amant qu’il lui livre des papiers compromettants de la dernière gravité. Mais Napoléonette veille. Elle a tout entendu. Et c’est elle, la filleule, l’admiratrice de Napoléon, qui va sauver le Roi ! Telle est son humeur Chevaleresque. Elle obtient du Roi qu’il lui confie les fameux papiers, et, pour les mieux garder, elle les porte ostensiblement dans son sac à main, à une soirée chez Mme de Rémusat, où elle danse, chante et se grise, ou plutôt fait semblant de se griser, afin de mieux duper les conspirateurs. A travers ces aventures et d’autres de même sorte, enlèvement du Roi, coups de pistolet, etc. Napoléonette conserve son imperturbable bonne humeur, semant sur son passage les termes d’argot comme autant de perles. « Sire, ne vous laissez pas embobiner, » dit-elle au Roi. Et à elle-même : « Ça va barder. » Sous Louis XVIII, déjà !… Tout cela un peu long et compliqué, mais gai et amusant, un peu enfantin, mais très bon enfant :

Mlle Danjou a obtenu un grand succès pour le brio avec lequel elle enlève le rôle de Napoléonette. Et M. Numès a dessiné une silhouette tout à fait remarquable de Louis XVIII placide et ironique.


RENE DOUMIIC