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résonance que les ondes interrompues et amorties qu’envoyaient les anciens appareils émetteurs de T.S.F. à étincelles rares.

C’est ainsi, par exemple, qu’à la Tour Eiffel une série d’audions branchés sur une seule antenne permettent de recevoir simultanément, à des téléphones différents et indépendamment les messages de New York, de Pétrograd… et de Berlin.

J’ajoute sans entrer dans d’autres détails) que l’audion permet d’amplifier les ondes hertziennes non seulement à la réception, mais aussi à l’émission, qu’il a revêtu des formes infiniment variées, qu’il a reçu parallèlement des noms divers et étrangement empruntés à un grec de laboratoire qui eût fait frémir Homère : audion, kenotron, pliotron, dynatron… j’en passe et de moins beaux. Mais il s’agit de satisfaire ici la physique et non l’étymologie.

Quoi qu’il en soit, cet exposé à la fois incomplet et barbare suffira, je pense, pour comprendre que les progrès accomplis dans la T.S.F. grâce à l’audion, ont quelque chose de féerique et qu’à côté de cette petite lampe merveilleuse, celle d’Aladin n’était qu’un méchant jouet d’enfant.

Et maintenant nous arrivons au rôle de la T.S.F. au front.

Chose curieuse, avant la guerre on n’envisageait la sans-fil comme ne devant servir que dans la période de mouvement des armées en attendant l’installation des fils. Or c’est le contraire qui a eu lieu et-une fois de plus les devins ont eu tort… Le métier de prophète est devenu bien aléatoire au siècle où nous sommes. Il est arrivé qu’une fois les fronts stabilisés, les fils du téléphone et du télégraphe ordinaire ont été si fréquemment disséqués par les bombardements qu’on a été peu à peu amené à doter l’infanterie de postes portatifs de T.S.F. qui ont rendu de merveilleux services. Tous les appareils d’un poste, réunis dans une caisse portative, pesaient à peine quelques kilos. De petits accumulateurs portatifs fournissaient les étincelles oscillantes à de petites antennes de quelques dizaines de mètres de long tendues au-dessus du sol et transmettant les ondes à des portées largement suffisantes pour les besoins de la zone de combat.

La grande question : empêcher les signaux de plusieurs postes voisins de se brouiller réciproquement ou d’être brouillés par l’ennemi, a été résolue en variant la longueur des ondes des divers postes (qui dépend entre autres de celle de leurs antennes) et aussi en accordant à volonté le poste de réception avec le poste qu’il veut écouter au moyen de l’audion.