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Dr Pfleger, intérieur et instruction publique ; Peirotes et Ricklin[1], sans portefeuille.

« Le Conseil national et la Délégation attendent de la population de l’Alsace et de la Lorraine qu’elle accueille avec confiance cette administration issue de ses représentants élus, et qu’elle fasse tout pour faciliter leur tâche dans cette période de transition qui sera probablement très courte…

« Le Conseil national fait à tous les employés du pays un devoir de rester à leur poste et de continuer leur emploi comme ils l’ont fait jusqu’à présent…

« Les lois pénitentiaires restent en vigueur…

« Le Conseil national accorde pleine amnistie à tous les condamnés politiques. »

Ces deux derniers paragraphes indiquent nettement que le Conseil national agit dans la plénitude de la souveraineté. Il en use de la même façon que l’Assemblée nationale en 1871, où M. Thiers ne reçut le pouvoir exécutif qu’en vertu d’une délégation révocable. Révolution mémorable dans l’histoire de l’Alsace et de la Lorraine, qui, pour la première fois depuis quarante-huit ans, deviennent maîtresses de leurs destinées !

Ce coup d’État ne rencontre pas de résistance.

Le président de la Chambre avise officiellement le statthalter que la deuxième Chambre a pris le pouvoir et nommé an ministère. M. Schwander s’incline. Il n’était que le Vice-Empereur : après l’abdication de Guillaume II, quelle autorité lui reste-t-il ? La même communication est faite au Conseil des soldats. Celui-ci, en majorité allemand, ne s’oppose pas à la formation du nouveau pouvoir, mais il est nettement hostile à la continuation des manifestations francophiles qui se déroulent depuis deux jours dans la ville[2]. Il menace d’intervenir, exigeant même la suppression des drapeaux et des cocardes aux couleurs françaises. Le Conseil national doit donc renoncer à l’acte d’adhésion immédiate à la France qui avait été primitivement projeté.

Le lendemain, à l’ouverture du Conseil national, le président déclare : « Au gouvernement qui avait été nommé par

  1. M. Ricklin se retira dès le lendemain du gouvernement, mais, sur la proposition de M. Peirotes, fut élu président du Conseil national (Strassburger Neue Zeitung du 13 novembre.)
  2. Strassburger Neue Zeitung, 11 novembre.