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sur l’estime réciproque et le commun dévouement au pays. » La hardiesse l’esprit à se contrôler soi-même, à s’offrir de soi-même à toute critique loyale, n’est-ce pas le ferment a la fois de toute découverte scientifique et de tout progrès moral ? Notre commandement y insista, et c’est pour l’avoir su faire qu’il chassa l’étrange cauchemar.

Il y parut presque aussitôt, à la façon dont nos troupes se comportèrent, toutes les fois qu’elles furent, les mois suivants, engagées à nouveau.

D’autres offensives françaises suivirent en effet, durant l’été et l’automne, toutes victorieuses : prise du Plateau de Californie, en juillet ; — prise de la Cote 304 et du Mort-Homme, en juillet-août ; — prise de Bixshoote, par une armée française mise sous les ordres du maréchal Haig, à la fin de juillet ; — prise de la Malmaison et du Chemin des Dames, le 23 octobre : — sans compter de puissants coups de main très fréquents.

Le caractère propre de ces actions, par comparaison à la bataille du 16 avril, c’en fut la moindre envergure. Une grande offensive à objectifs éloignés, celle du 16 avril, qui déçoit ; puis, quatre offensives à objectifs limités, qui réussissent : ainsi peut-on résumer, si l’on s’en tient au contour extérieur des faits, la campagne de 1917.

C’est que la Russie était désormais défaillante : ses troupes refusaient de se battre. Les armées des Empires du Centre engagées sur le front oriental devenaient disponibles pour renforcer leurs armées de l’Ouest. A la fin de 1917, les forces des deux partis sur le front de France se faisaient équilibre ; mais cet équilibre pouvait, au premier signe des Centraux, se rompre à leur avantage.

Etait-ce le moment pour l’Entente de risquer un suprême effort, alors que l’Amérique venait seulement de se décider en notre faveur, alors que notre artillerie était en plein progrès comme nombre et comme qualité ; comme nombre, par la création prévue de quarante nouveaux régiments ; comme qualité, par un accroissement de sa mobilité, que l’on obtiendrait en substituant la traction automobile à la traction hippomobile ?

Dans le même temps, l’emploi par les Allemands des obus à l’ypérite commençait à produire de tels ravages dans nos rangs qu’il nous fallait différer la reprise des grandes opérations jusqu’à ce que nous eussions découvert une formule