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forces alliées ou associées. Si l’Allemagne s’exécute fidèlement, au bout de cinq ans la tête de pont de Cologne sera évacuée ; au bout de dix ans, la tête de pont de Coblence ; au bout de quinze ans, les têtes de pont de Mayence et de Kehl et le reste des territoires de la rive gauche. Mais si elle traînait ou se dérobait, l’évacuation pourrait être retardée; les zones évacuées pourraient même être réoccupées.

Telle est, en ses lignes de charpente, la paix de Versailles, telle du point de vue le plus étroitement français, mais ce point de vue trop étroit serait faux, et notre paix particulière avec l’Allemagne ne se sépare pas de la paix générale en Europe. Il faudrait joindre aux dispositions qui nous touchent directement celles qui concernent la Belgique, le Luxembourg, l’Autriche, la Tchéco-Slovaquie, la Pologne, la Russie. Pour l’Autriche, par exemple, « l’Allemagne reconnaît et respectera pleinement l’indépendance de l’Autriche dans les frontières fixées par le présent Traité. Cette indépendance demeurera inaliénable, sauf décision approuvée par la Société des Nations. » Le sens de cet article est net, et sa portée certaine. Pour la Russie, « l’Allemagne reconnaît et respectera pleinement l’indépendance inaliénable de tous les territoires qui ont fait partie de l’ancien Empire russe.» Elle accepte définitivement « l’annulation du traité de Brest-Litovsk et de tous traités ou accords, de quelque nature qu’ils soient conclus par l’Allemagne avec le gouvernement maximaliste. » Mais ce n’est pas tout. Il faudrait joindre, d’autre part, les stipulations qui suppriment les colonies allemandes; pour nous, les dispositions spéciales au Maroc, celles qui abrogent les traités de 1911 et de 1912, le premier, au moins, de triste mémoire. Il faudrait reprendre, comparer, rapprocher, assembler, faire jouer en composition partie par partie, section par section, article par article. Il faudrait compléter le traité, proprement dit, de paix avec l’Allemagne par le Pacte de la Société des nations, et ce Pacte lui-même par la caution supplémentaire que, le matin du 7 mai, avant la séance, M. le Président Wilson et M. Lloyd George ont donnée ou promise à M. Clemenceau. « En plus des garanties fournies par le Traité de paix, le Président des États-Unis d’Amérique s’oblige à proposer au Sénat des États-Unis et le Premier ministre de la Grande-Bretagne s’oblige à proposer au Parlement de la Grande-Bretagne un engagement, soumis à l’approbation du Conseil de la Société des nations, aux termes duquel les États-Unis et la Grande-Bretagne viendront apporter immédiatement leur assistance à la France en cas d’une agression non provoquée dirigée contre elle par l’Allemagne.