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plus regrettable peut-être, la voie ferrée de Landau à Sarrebruck par Deux-Ponts et Saint-lngbert ; et nous n’avons pas Sarrelouis en pleine restitution territoriale, nous ne l’avons qu’en possession, en occupation précaire; ni Landau, ni Sarrelouis, si fidèlement français tant que ne leur fut pas interdit tout espoir de le redevenir ; Landau, Sarrelouis, aussi français que la plus française des villes d’Alsace et de Lorraine. Le sacrifice est douloureux ; puisqu’il n’est pas possible que l’extrême effort n’ait pas été fait pour nous l’épargner, à quel préjugé, à quel parti pris nous sommes-nous heurtés ? Comment n’a-t-on pas compris que l’œuvre de 1815 était à défaire et à retourner; que, tandis qu’en 1815, l’Europe prenait ses sûretés contre une France qu’elle estimait agressive, c’est contre l’Allemagne, en 1919, qu’elle avait à en chercher; qu’en conséquence, une frontière qui donnait barre à l’Allemagne sur la France lui donnait barre sur l’Europe même, était une menace pour la paix, et que cette frontière, faible et truquée, appelait une rectification ? Nous n’avions pas d’ambitions excessives ; pas d’ambitions du tout ; nous ne demandions pas d’annexions ; mais seulement une réincorporation. Ce n’était pas la politique « des limites naturelles; » notre sagesse, un peu timide, nous en retient bien loin : passant par la bouche des vivants, la voix de nos 1 500 000 morts n’a pas été assez forte. Si nous sommes trop discrets pour nous en plaindre, personne ne peut nous défendre de nous en affliger.

Toutefois, du paragraphe qui nous reporte à « la frontière de juillet 1870, » il est équitable de rapprocher la section III de la partie III qui regarde la rive gauche du Rhin, où l’Allemagne, est-il prescrit, ne maintiendra ni ne construira aucune fortification, ni sur la rive gauche, ni à moins de cinquante kilomètres à l’Est du Rhin. Dans la zone ainsi définie, l’Allemagne « n’entretiendra aucune force armée, ne fera aucune manœuvre militaire et ne conservera aucune facilité matérielle de mobilisation. » (Il est ajouté, dans la partie V, que les fortifications existantes seront désarmées et démantelées et les installations matérielles visées ci-dessus, démolies dans un délai de trois mois à dater de la mise en vigueur du traité). Il n’est que juste de rapprocher, en outre, la section VI, relative au bassin de la Sarre, et juste de reconnaître que, puisqu’on ne pouvait pas faire plus ou qu’on ne voulait pas courir certains risques, l’arrangement, en somme, est satisfaisant. Cette section, qui circonscrit le territoire auquel s’appliquent les stipulations du traité, « consacre la cession à la France de la propriété entière et absolue, franche et quitte de toutes