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comme par le vicomte Ishii à Washington, à New-York et à San-Francisco, ne laissait aucun doute sur l’esprit d’entente et d’amitié qui animait les relations des deux grands États d’Asie membres de l’Alliance.

Les événements qui maintenant allaient surgir en Russie et affaiblir, sinon ruiner, le front oriental des Alliés en Europe, auraient pour conséquence de donner au rôle des deux grands États d’Asie une importance singulièrement plus directe et active, et de faire d’eux notre armée de secours ou tout au moins notre avant-garde contre le nouveau péril que créait l’effondrement de l’ancien Empire des tsars et l’ouverture, par la brèche de Riga au Dniester, de toute la Moscovie, de la Sibérie, des immenses territoires de l’Asie.


II

La série de crises qui, à la fin de 1917 remirent aux mains des Bolcheviks, avec les villes de Petrograd et de Moscou, la domination de la Russie, les négociations de paix engagées par Lénine et Trotsky avec les Empires centraux, la Bulgarie et la Turquie, la signature, au mois de mars 1918, des traités de Brest-Litovsk, si elles étaient pour les Alliés une grave défaite et la menace d’une nouvelle et prochaine agression sur le front d’Occident, atteignaient de même et inquiétaient nos alliés d’Extrême-Orient. La Chine et le Japon qui, depuis les accords conclus de 1905 à 1912, avaient dans la Russie un bouclier contre l’Allemagne et les Puissances centrales de l’Europe, se trouvaient tout d’un coup découverts et exposés du côté d’où ils auraient pu le moins s’y attendre. Et le danger était d’autant plus à redouter que ce que la Russie et, derrière elle, l’Asie, offraient à l’Allemagne et à ses complices épuisés par le blocus, c’était ou ce semblait être le ravitaillement immédiat et illimité, l’abondance des vivres et des matières premières, la saisie facile de ressources et de réserves que la trahison ou la complaisance bolcheviste livrait sans défense à nos ennemis. L’Asie, que les accords du Japon avec la Grande-Bretagne, la France et la Russie, et l’accession de la Chine à ces accords, avaient convertie en une place forte de l’Entente, risquait maintenant d’être assiégée et envahie comme la Russie elle-même.

La Chine et le Japon, comme les Alliés d’Occident, virent