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qu’un élargissement de la tactique défensive déjà plusieurs fois appliquée par les Allemands, quand il leur avait fallu remédier, par des dispositifs appropriés, aux accidents locaux de l’immobile guerre de siège. Elles ne ressemblent en rien non plus au système pratiqué naguère par Ludendorff, quand il avait évacué devant Noyon une ligue fortifiée pour se replier sur une autre ligne fortifiée et y transporter à nouveau l’immobile guerre de siège. Si nous l’entendons bien, la nouveauté réside ici dans l’idée d’adapter aux conditions encore subsistantes de la guerre de siège, qui va finir, les principes et les pratiques de la guerre de mouvement, qui va reprendre.

En effet, on peut dire que, depuis trois ans, l’armée française se tenait au long de ses tranchées tout entière « rangée en bataille, » — ce qui est une situation de fin de combat, contradictoire à l’idée même de guerre de mouvement. Tout au rebours, au début de 1918, en vertu des prescriptions nouvelles, l’armée française, sachant que les fronts ont cessé d’être inviolables, prévoyant qu’elle sera attaquée, mais ignorant encore en quelle direction elle le sera, « stationne » dans ses cantonnements, à une ou plusieurs étapes en arrière des tranchées, couverte par une couverture générale, — ce qui est l’idée même et le dispositif essentiel de la guerre de mouvement. Sa couverture générale, ce sont les divisions en secteur, lesquelles, ainsi qu’il convient à des troupes d’avant-garde et comme elles feraient en guerre de mouvement, ne soutiendront, s’il le faut, dans la zone avancée, que des combats en retraite. Toutes conditions qui sont en quelque mesure comparables à celles des premiers jours des hostilités, alors que des troupes de couverture abritaient aux frontières les mouvements de concentration de nos armées.

En arrière de la zone avancée, la répartition des réserves est telle, en principe, que l’on trouve toujours : 1° à moins d’une forte étape du front, les divisions et les régiments d’artillerie lourde nécessaires pour exécuter les renforcements qui auraient un caractère d’urgence impérieux ; 2° à une journée au plus de transport automobile, les états-majors, les grandes unités, les régiments d’artillerie lourde destinés à « tenir le champ de bataille » (occupation des positions de résistance, organisation du commandement, établissement en profondeur du dispositif d’artillerie) ; — 3° à une distance plus ou moins