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celle de la production, la fonction de l’épargne n’est pas moins essentielle dans notre économie nationale : si l’une crée la richesse, l’autre la conserve et la féconde au profit de l’avenir.

Ce sont là d’évidentes vérités, de tous les temps et de tous les lieux, — surtout des lieux communs ! Au vrai, il n’y a que ces vérités-là qui comptent. Notre pays est en un tournant décisif. Que par la production et l’épargne il entre largement dans la voie du progrès économique, et il sera sauvé : le poids de la dette s’abaissera à mesure que les forces et les moyens du pays s’élèveront, et le fardeau en sera aisément porté, comme il en a été en Angleterre après 1815. Revenir purement et simplement à la situation d’avant la guerre ne serait pas, avec nos charges nouvelles, une solution. Il faut que nous devenions plus forts et plus riches, sans quoi nous deviendrons plus pauvres, pauvres à jamais. Entre le progrès et la décadence économique il n’y a pas de milieu, pas d’état stationnaire : si la France ne s’enrichit pas, elle va fatalement à la misère. Il faut « tenir » pendant les années de liquidation, de transition, comme nous avons « tenu » pendant la guerre ; mais cela ne suffit pas : il faut qu’un large et puissant essor économique nous vienne donner une vie nouvelle. Si le malheur veut que nous n’ayons rien appris et rien oublié, si nous devions retomber comme autrefois dans la discorde et le désordre, l’incurie et l’inertie, alors ce serait à désespérer de l’avenir. Noire salut n’est que dans l’effort acharné de travail et d’épargne. Puissent nos gouvernants favoriser cet effort, au lieu de l’étouffer par le socialisme, de l’épuiser par la fiscalité, ou de le décourager par le gaspillage, et puissent toutes les classes comprendre qu’elles sont solidaires devant le problème de notre avenir économique et financier ! Plus difficile est la tâche, plus méritoire est l’effort : où a-t-on vu que les grandes œuvres aient jamais été réalisées autrement que dans la peine et l’épreuve ?


L. PAUL-DUBOIS.