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pour le profit, ad prædam, mais pour le droit et la justice. Il est bien permis cependant de compter qu’une complète réparation sera tirée de l’agresseur vaincu pour toutes ses déprédations et destructions, ainsi qu’une certaine compensation pour les frais de guerre dont il -nous a imposé la charge, et que le retour de nos provinces perdues apportera une vigueur nouvelle à la mère patrie. Il est bien permis de penser aussi que le vainqueur aura pour lui, avec la faveur du monde, le prestige de la victoire ; sa valeur financière sera grandie de toute sa valeur militaire, et la fortune économique lui viendra à la suite de celle des armes.

Nous voulons enfin espérer dans les bienfaits de l’étroite union qui lie les Puissances alliées, et qui, née de la guerre, survivra à la guerre. D’abord politique et militaire, elle s’est étendue à l’ordre économique et financier : elle s’élargira encore. Que ce soit en matière de circulation, .de change, ou d’emprunts, l’entr’aide éventuelle des États de l’Entente ouvrira d’heureuses perspectives en vue de la liquidation des charges de la guerre. Les possibilités en sont encore incertaines, les modalités nuageuses ; mais ce qui semblait chimérique hier paraîtra demain sans doute nécessaire, et prendra peut-être corps bientôt : nul meilleur terrain pour les débuts de la Ligue des Nations !

Voilà, n’est-il pas vrai ? de précieux gages d’espoir. Mais, à côté de ces promesses de l’ordre moral ou virtuel, on peut se demander, — et c’est ce que nous voudrions faire ici, — comment et dans quel sens vont agir sur nos finances quelques-unes des forces qui de tout temps ont fait mouvoir le monde matériel. Loin de nous la pensée de vouloir établir un pronostic, ni même un diagnostic en règle devant le cas aigu de pathologie financière dont nous sommes à la fois les témoins et les sujets. Il ne s’agit que d’essayer de voir un peu clair dans notre situation et dans l’influence que pourront exercer sur elle tels ou tels mouvements économiques dont aussi bien le jeu devra régler notre action. Mais d’abord nous demanderons la permission de montrer, en manière d’illustration historique, ce qu’est l’écrasant fardeau qu’a pu supporter, sinon sans faiblir, du moins sans faillir, une grande nation, alors notre adversaire, aujourd’hui notre alliée, au cours et au sortir d’une guerre qui passait jusqu’à nos jours pour la plus grande des